dalian - i'll be right there to remind you again, you know me.

I SWEAR I'M JUST A BIRD ϟ Hope you see It won't mean a thing to me, I've been doing this too long, Baby girl, I've felt it all, So watch out If you try to play your luck, Ain't nobody gonna care enough To catch you fall, So don't you fall in love, Don't make me make you fall in love, Don't make me make you fall in love with a player like me, Nobody needs to fall in love.

Sa mère a passé la journée entière à organiser et "nettoyer", comme elle dit, le manoir, comme si elle avait jamais tenu le moindre torchon de sa vie. Evan se serait bien vu passer la journée ailleurs, trouver une excuse pour échapper à la soirée mais étrangement, son père a insisté pour qu'il reste, toute la journée et surtout pour le dîner. Il sait pourtant qu'il ne sera pas véritablement bien accueilli à sa propre table. Ce soir, les Rosier reçoivent les Fawley, le père, la mère, le fils et la fille, pour l'anniversaire de cette dernière, sa majorité précisément. Elle et Luke forment un merveilleux couple, tout le monde s'aime, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Evan est las.

Sa famille est lasse, elle aussi, ils n'ont véritablement pas hâte de devoir souffrir la présence du fils aîné pendant tout le dîner, ainsi le laisse-t-il tranquille la majorité de la journée, qu'Evan passe à jouer aux dominos tout seul dans sa chambre, sur son lit. Il aimerait que le Seigneur l'appelle et lui donne une mission, il aimerait aller voir Bellatrix et la supplier de le prendre avec lui faire quelque chose, il aimerait aussi transplaner chez Wilkes, ou chez Avery, afin qu'ils le distraient, l'emmènent sur le Chemin de Traverse acheter quelque chose (son matérialisme aide beaucoup Evan quand il est d'humeur maussade) et qu'ils oublient tous les trois "malencontreusement" le dîner de ce soir. Mais il ne le fait pas. À la place, Evan joue aux dominos et finit par les envoyer valser de frustration au fond de sa chambre.

Il passe le reste de la journée au fond de son lit à contempler toutes les possibilités pour échapper à l'inévitable soirée d'horreur, mais par toutes les rejeter une à une. Finalement, avant de commencer à se préparer, il va ramasser les pièces et les range avec soin dans leur boîte. Ses doigts ne s'attardent pas sur les inscriptions dorées que Dalia y a tracé à la main.

C'est dans le salon qu'il échoue. Il porte une veste légère et une expression fermée, qui se détend peu à peu à mesure qu'il entame à petites gorgées le verre de whisky Pur-Feu que Scroungy l'elfe de maison lui a apporté; il est d'abord rejoint par Luke, qui l'ignore soigneusement et qu'il ignore soigneusement, puis leur mère, puis leur père. “ Lovely evening for a birthday, ” dit-il et on l'ignore jusqu'à ce que tout le monde s'éveille dans la sonnerie de l'entrée résonne.

Evan ne se lève même pas quand les Fawley investissent la pièce. M. Fawley lui adresse un regard et ne répond pas à son signe de main; Mrs. Fawley, qui l'appréciait pourtant tellement, l'ignore soigneusement et va plutôt accaparer Luke; Abel discute poliment avec sa mère et il ne reste que Dalia, qui ne lui adresse pas un regard en se tenant près de son nouveau fiancé et de sa mère. Evan a l'impression que la planète change d'axe lorsqu'il se lève et que tout le monde tourne le regard vers lui, alors qu'il s'approche d'elle comme si il n'y avait rien d'autre qui existait au monde. “ Dalia. ” Il tend la main dans l'espoir d'attraper la sienne, en embrasser la jointure de ses poings, ou prétendre le faire; geste similaire à celui qu'il a esquissé devant leurs familles à Noël dernier. La soirée s'était finie différemment ceci dit. Sa voix dégouline d'ironie et surtout d'une amertume inavouable quand il parle: “ You look lovely tonight. Let me wish you a fantastic and amazing birthday full of joy and love. Everything you deserve. ”

you're not sorry ϟ She said it won't be long before she falls out of love It won't be long before she falls out of love Sandpaper kisses, papercut bliss don't know what this is, but it all leads to this you're gonna leave her you have deceived her you're just a bird

“ Chin up, Dalia, we’re going to your birthday diner not your funeral. ” le ton de sa mère est léger, mais ses mots ont le mérite d'attirer l’attention de Dalia qui s’exécute avec une petite moue et arrange les perles à son cou. C’est, croit-elle, la première fois qu’Alessandra admet qu’elle puisse être moins que ravie à l’idée d’aller chez les Rosier, à l’idée d’en devenir une, aussi. À croire que pendant tout ce temps sa mère s’en est doutée, mais n’a rien voulu dire pour ne pas encourager ses réserves. Le sourire sur ses lèvres est fatigué et la Serdaigle se demande si elle aussi en a plus qu’assez, si elle aussi, en dépit des cadeaux des Rosier toujours somptueux pour la fête de sa fille, préfèrerait largement rester chez elle pour célébrer sa majorité avec quelques jours d’avance. Dalia ne croit pas en revanche que sa mère se rende compte comme, outre le fait de devoir aller dans ce manoir maudit, l’occasion elle-même la rend un peu malheureuse. Elle se souvient avoir attendu avec hâte son dix-septième anniversaire pendant des années, pensant naïvement que ce serait synonyme de liberté, mais l’âge adulte ne semble pas vouloir lui offrir beaucoup plus que la promesse que son mariage arrangé se rapproche dangereusement et que son futur loin d’être à portée de main lui échappe bien trop vite. Après que sa mère ait inspecté une énième fois sa tenue, celle d’Abel et celle de leur père, avec un petit hochement de tête satisfait à l’intention de chacun, ils transplanent jusque chez les Rosier, la main de Dalia dans celle d'Alessandra puisqu'elle n'a pas encore obtenu son permis. L'adolescente a les lèvres pincées quand elles arrivent devant la porte, mais se force à sourire aussitôt que l'elfe leur ouvre la porte et les annonce et que l’on vient la saluer elle et sa famille. Tout ça est ridicule et, à ce stade, elle ne peut pas croire que quiconque n’en soit pas incroyablement las. Il s’agit d’un arrangement presque commercial et l’envie de voir leurs enfants liés n’a pas grand chose avoir avec tout ça et leur bonheur encore moins, mais tout de même, si elle veut bien comprendre qu’on l’ait offerte à Luke et qu’il soit important de maintenir la face devant le monde, elle ne comprend pas pourquoi il est important de leur faire en privé aussi. Tout le monde dans ce salon se déteste certainement, en tous cas Fawley et Rosier sont presque ennemis, mais ils se sourient comme s’ils ne le savaient pas pertinemment, comme s’il était impensable de simplement se serrer la main en public et se contenter de se retrouver dans une poignée d’années à l’autel. Elle ne voit pas l’intérêt que sa future belle-famille peut avoir à fêter son anniversaire de toutes les occasions qui peuvent les amener à se rencontrer et s’imposer le supplice d’une soirée qui promet d’être gênante au possible.

Plus gênante même qu’elle ne l’aurait cru comme elle s’en rend compte en embrassant Crescentia, repérant du coin de l’œil l’aîné de la fratrie Rosier assis sur un fauteuil. Personne ne l’a prévenue de sa présence et elle a bêtement pensé que c’était qu’il ne serait pas là. Elle est prise de court et encore plus embarrassée et agacée d’être là, mais n’en montre rien, sourit à son futur-beau père, laisse Luke lui embrasser la main comme si elle n’avait pas encore la trace des lèvres d’Evan gravée sur sa peau. Et puis, elle se retrouve un peu à l’écart brusquement quand les pères discutent et que les mères ont accaparé le fils l’une de l’autre, elle reste près de la sienne, se tenant bien (trop) droite et refusant d’adresser le moindre regard à son ancien fiancé dont elle décide d’ignorer purement et simplement la présence ; seule façon de s’assurer que cette soirée qui promet d’être désagréable ne soit pas non plus un désastre complet. Evan semble vouloir tout le contraire. Quand il se lève et s’approche d’elle, c’est comme si tout le monde s’était arrêté de respirer, quoique Dalia se force à inspirer et expirer sans le moindre accroc malgré sa surprise. Elle ne veut pas qu’il s’imagine qu’elle en a quoi que ce soit à faire de lui, qu’elle ressent autre chose que de la haine pure et dure et amplement méritée. “ Dalia. ” Elle daigne à peine lui accorder un regard, encore moins offrir quoi que ce soit à attraper à la main qu’il tend vers elle.  “ You look lovely tonight. Let me wish you a fantastic and amazing birthday full of joy and love. Everything you deserve. ”  Elle sait qu’elle n’imagine pas toute l’ironie de son ton, Evan n'en a rien à faire d'elle et de son bonheur et de son anniversaire et de ce qu'elle mérite. Il la hait, elle a mis du temps à s'en rendre compte, mais elle le sait pour sûr désormais.

Dalia se sent un peu prise au piège, comme chaque fois qu’elle se retrouve chez les Rosier depuis la rupture de leurs fiançailles, d’une façon qu’elle n’a jamais ressenti avant, même quand elle et Evan ne se parlaient même pas. Entre ce qu’elle a envie de faire — écraser sa paume contre sa joue, y planter ses ongles jusqu’à le faire saigner — et ce qu’elle doit faire — rester polie devant ses beaux-parents — il y a tout un monde. Elle aimerait qu’ils ne l’aient pas invité, elle se demande presque s’ils le font exprès: si ça les embête tellement de l’avoir comme belle-fille (elle sait au moins que c’est le cas de Crescentia) qu’ils essayent de la faire craquer, de lui faire faire un faux pas, public cette fois, afin qu’elle ne puisse échapper à sa part de responsabilité et qu’ils puissent enfin se débarrasser d’elle. Elle déglutit difficilement, avec l’impression de physiquement ravaler sa fierté au passage.  “ Why, thank you very much Evan. ” se contente-t-elle de dire presque plus à l’assemblée qui se détend de façon presque palpable qu’à lui et quand ils font mine de reprendre leurs conversations elle baisse légèrement la voix: “ But you did more than wish it all already, you made sure it would happen. ” Son sourire est sardonique, mais sa voix plus amère qu’elle ne le voudrait. Elle aimerait sincèrement se considérer heureuse d’être débarrassée de lui, pouvoir dire qu’il était un obstacle certain à son bonheur et pourtant… Ses ongles s’enfonçant un peu dans sa paume alors qu’elle lui refuse toujours ses doigts à embrasser ou effleurer comme par peur que le contact ne la brûle. “ I wish I could wish you the same but my mother taught me not to lie. ” Archi faux si le mensonge est plus poli que la vérité, mais peu lui importe quand elle chuchote presque ses mots sans se départir de son sourire mielleux.

Evan espère qu'elle est agacée, il espère qu'elle le hait. Non, il le sait qu'elle le hait. Il l'a embarrassée, teintée, ruinée à jamais. Il espère qu'elle a honte, il espère qu'elle est en colère en cet instant précis: il a l'impression de voir de la rage dans ses yeux, parmi le déluge d'émotions qui l'agite. Il a appris à la connaître, l'a vite oubliée; peu importe, véritablement, parce qu'Evan s'en fiche beaucoup maintenant. Le temps a passé, l'eau sous les ponts aussi. Elle est à Luke sauf qu'elle ne sera jamais entièrement à son frère. Tout ce qu'il a pu ressentir pour elle, dans ce même manoir, la première fois qu'ils se sont embrassés notamment, semble si... lointain, alien presque. Impossible. Des fois, Evan a l'impression d'oublier que les sentiments existent; il se détache tellement du monde que la douleur, le bonheur, n'importe quoi semble... impossible. Il n'y a que l'ennui et le vide et l'envie de détruire quelque chose — ce sentiment-là, en revanche, ne le quitte jamais.

Il y a un petit instant de silence, tendu sous les regards précautionneux de leurs parents, avant que Dalia déglutisse (sa gorge, qu'Evan regarde brièvement, s'agitant presque douloureusement semble-t-il) et réponde: “ Why, thank you very much Evan. ” Il sourit en coin, la risette presque froide sur sa bouche, elle l'a vu plus détendu que ça. Plus... eager, earnest, presque heureux. Elle l'a presque rendu heureux et c'est ça qui lui a fait peur, il s'est désabonné des sensations fortes il y a longtemps, et elle avait trop de pouvoir sur lui. Evan sait qu'il a pris la bonne décision, il n'en doute pas un seul instant. Et l'amertume ironique de Dalia l'amuse. Rien que ça. C'est si simple de se convaincre. Les adultes autour d'eux se détendent un peu en entendant la réponse polie de Dalia, font mine de se détourner, Evan a toujours la main tendue et ne la baisse pas. Il ne connait pas vraiment l'embarras.

“ But you did more than wish it all already, you made sure it would happen. ” Est-elle heureuse avec Luke? Le fait-elle attendre sous la neige et est-elle contente de le voir devant le bâtiment de la poste à Pré-au-Lard, contente d'aller boire du thé avec lui? Joue-t-elle aux dominos avec lui? (Il a volé une pièce du set qu'il lui a offert au précédent Yule pour ne pas qu'elle puisse réellement jouer, pas de manière entière en tout cas). Est-elle soulagée d'avoir hérité du cadet? Evan s'en fiche, il se demande juste. Elle ignore toujours sa main, Evan ne faillit pas. “ I wish I could wish you the same but my mother taught me not to lie. ” Il rit légèrement, acceptant de se redresser en laissant ses doigts retourner à ses poches. “ Never stopped you before, ” commente-t-il, mettant sans malaise en avant le fait qu'il la connaisse. Qu'elle peut mentir aux autres mais pas à lui, quand bien même il n'est pas trop étonné qu'elle ne soit pas contente de le voir ou lui souhaite un bon anniversaire, quand bien même le sien était en mars et qu'ils ont eu le temps de le célébrer. Ensemble. “ I hope your birthday is as memorable as mine wash, ” énonce-t-il, avec un sourire en coin.

Ils avaient passé la soirée ensemble. Elle s'était même un peu déshabillée pour lui, il avait réchauffé chaque recoin de son coeur avec ses lèvres. Elle avait bien aimé ça, est-ce que Luke fait ça lui aussi? Est-ce qu'il est plus patient, moins intense, moins avide? Evan a reporté ses envies sur d'autres filles, il s'en fiche de Dalia. “ I got you a gift, ” dit-il, suffisamment fort pour que tout le monde l'entende, quand Dalia fait mine de diriger son attention sur quelqu'un d'autre (il déteste quand il n'en est pas le centre dans toutes les situations). Il peut presque entendre le grincement de dents de son père, la surprise étouffée de sa mère, la réprobation de M. et Mrs. Fawley, mais il ne leur adresse pas un regard, ses yeux plantés dans ceux de Dalia. Il n'a dit à personne qu'il allait lui offrir quelque chose. Même Luke doit être surpris et méfiant. “ Do you want to see it? ” propose-t-il d'un ton léger. Il doute que ça lui plaise autant que ces précédents cadeaux, ceci dit.

Evan rit, un son qu'elle appréciait avant, dont elle se méfie affreusement désormais ; ils sont ennemis ce qui le réjouit ne peut être que mauvais pour elle et ses sourires quand il la regarde que moqueurs. Il range enfin sa main dans poche, ayant fini par comprendre qu'elle n'attraperait jamais ses doigts, regards parentaux posés sur eux ou non. “ Never stopped you before, ” Non, c'est vrai. Elle lui disait ce qu'elle pensait avant, leçon de sa mère ou pas, elle ne mentait pas et n'était pas toujours agréable, ni d'accord avec lui, ni même polie. Elle ne se retenait pas devant lui, il a raison, mais ça l'énerve et l'enrage qu'il ose le mentionner, ce before, cet avant-scandale quand elle était encore naïve, tellement naïve de croire que ce qu'elle avait à lui dire pouvait l'intéresser, qu'elle pouvait l'intéresser. Elle aimerait qu'il n'en parle jamais, parce qu'elle a honte d'abord de s'être faite avoir, de s'être laissée totalement berner par Evan et ses regards et ses baisers. Elle se sent tellement stupide. Mais elle aimerait qu'il n'en parle jamais aussi parce que ces moments ont encore une certaine valeur à ses yeux, même si ça ne devrait pas être le cas, même si elle ne veut pas y penser, et encore moins l'admettre. Elle n'aime pas l'entendre en parler, salir ces souvenirs, lui rappeler, comme si elle pouvait l'oublier que tout ça n'était qu'un jeu pour lui. Dalia pince des lèvres, ne répond pas, se détourne presque déjà ; par égard pour le minimum requis par l'étiquette elle a bien voulu se laisser saluer et répondre à son vœu dont elle ne doute pas un instant qu'il soit insincère, mais c'est tout ce qu'elle consent et consentira jamais plus à lui offrir. Et encore. Ce n'est véritablement que pour le bénéfice de leurs parents qu'elle en a déjà tant fait.

“ I hope your birthday is as memorable as mine was, ” le sourire en coin sur les lèvres d’Evan lui donne des envies de meurtres. Bien évidemment elle doit se retenir, serrer les poings, ses ongles s’enfonçant douloureusement dans la chair de ses paumes, les muscles de sont visage trop tendus pour empêcher la rager de le froisser. Ce n’est pas tant que le souvenir de son anniversaire soit désagréable, au contraire. Elle se demande même qui de lui ou d’elle a le plus profité de la soirée qu’ils ont passé ensemble en mars dernier, du cadeau informel qu’elle lui a offert en lui laissant un accès nouveau à son corps et en se laissant dévorer. Non, c’était mémorable pour sûr et d’une façon des plus agréables et même parfaites. Mais plus les souvenirs qu’elle a d’Evan sont bons et plus elle les hait parce qu’ils sont teintés aujourd’hui par ce qu’il lui a fait et l’impression que rien de ce qui s’est jamais passé entre eux était vrai. Ça en avait l’air, mais ça ne l’était pas, et cette sensation est pire encore quand il ose en parler, moqueur, indifférent, cruel. Elle le hait, lui. “ I got you a gift, ” Cette fois s’il s’adresse en apparence encore à elle, c’est à l’assemblée que composent leurs familles qu’il parle, attirant leur attention d’une voix forte, agaçant définitivement Dalia qui préfèrerait largement ne pas lui parler du tout, mais préfère encore laisser leurs parents en dehors de tout ça. Elle peine à comprendre l’angle d’Evan, ce qu’il cherche à faire. Elle s’imagine que tout ce qu’il a toujours voulu c’était se débarrasser d’elle. Elle ignore si c’était personnel ou juste l’envie d’être libre tout simplement — quelque chose qu’elle pourrait comprendre au fond, même si c’était à son détriment à elle et que ça n’excuse pas ses méthodes. Elle pense que c’était forcément un peu à propos d’elle en particulier, pas par pur égocentrisme mais simplement parce que l’acharnement qu’il a encore à vouloir l’embarrasser et l’agacer et la heurter le prouve. Il est libre, mais il n’en démord pas, ne veut pas la laisser tranquille, s’invite jusqu’à son propre anniversaire, il est libre, mais c’est à croire qu’il ne veut pas qu’elle le soit.

“ Do you want to see it? ” Non. Non elle n'en a pas envie. Il lui a fait de beaux cadeaux Evan, personnels, d'une valeur pour elle à l'époque inestimable. Il lui a fait les meilleurs cadeaux qu'elle ait jamais reçu. Et puis il lui a fait la pire chose qu'on lui ait jamais faite et elle ne veut plus rien de lui désormais que peut-être une paire d'explications et d'excuses. Mais elle sait que ça, ça ne viendra jamais. De ça, elle est même certaine. Elle ignore ce qu'il a en tête, quel genre de cadeau il compte lui offrir et si même il en a véritablement un, mais elle s'en moque, parce que ce qu'elle sait cette fois c'est que ça ne lui plaira pas, que ce doit être une mauvaise blague, un piège, une énième humiliation et qu'elle n'a pas la moindre envie de s'y laisser prendre. Mais on les écoute et elle doit être polie. “ How lovely! ” fait-elle en desserrant à peine les dents et sans le moindre sourire. “ I think it would be more appropriate however for me to take my fiancé's gift only. ” Elle ignore si Luke a un cadeau pour elle, sûrement pas d'ailleurs, mais peu importe, celui des Rosier sera en son nom à lui. “ I'm sure you understand. ” Elle est plutôt sûre que non. Il n'y a rien de décent chez Evan et ils le savent tous les deux, même si elle a pu y croire elle, l'espace d'un instant. Il n'a jamais eu le moindre égard pour ce qui était appropriate. “ Why don't you keep it for your next victim Evan? ” fait-elle tout de même, quoiqu'à voix basse une fois qu'elle pense ses obligations de politesse, nécessaires à satisfaire les oreilles indiscrètes autour d'eux, remplies. Elle a déjà donné, est déjà passée par sa table de bourreau et ne compte pas retenter l'expérience. Elle n'est plus à lui de quelque façon que ce soit, n'est certainement plus sienne à torturer. Elle voudrait presque qu'il lui confirme qu'il a déjà trouvé sa remplaçante, sa prochaine victime, même si ça doit vouloir dire qu'elle n'a jamais été spéciale à ses yeux, d'aucune façon que ce soit. Elle veut juste qu'il la laisse tranquille, mais même ça, ça semble trop lui demander. “ Why are you even here? ” souffle-t-elle finalement même si elle était décidée à écourter du mieux qu'elle le pouvait la conversation elle veut savoir elle veut l'entendre, elle veut comprendre pourquoi il la hait tant, elle qui finalement, sur la fin surtout, n'a jamais rien tant voulu que lui plaire.

Evan sait que Dalia aimait bien ses cadeaux. Il adorait la voir porter son rouge à lèvres, jouer avec ses dominos. Voir son sourire surpris, satisfait et surpris, à chaque fois qu'elle les découvrait. Jamais emballés, mais toujours précieusement gardés, généralement en référence à quelque chose qu'ils avaient fait ensemble: des broutilles parfois, des blagues déguisées en objets, des petites choses qui lui faisaient penser à elle quand il les voyait. Il ignorait qu'il pouvait être attentionné avec quiconque avant, et il doute qu'il puisse l'être avec qui que ce soit si ce n'est elle. Étrange émotion parce que maintenant, il regretterait presque d'avoir dépensé tant d'argent, tant de temps pour elle: elle n'en valait pas la peine, et il lui a fallu de la voir si souriante avec Luke pour s'en rendre compte. “ How lovely! ” Là où Dalia ne sourit pas, un rictus traîne encore sur les lèvres d'Evan, amusé de la voir se forcer, jouer la comédie, ça a l'air d'être si dur pour elle soudainement. Elle ne convainc personne mais ce n'est pas très important, au final. “ I think it would be more appropriate however for me to take my fiancé's gift only. ” Evan fronce les sourcils, contrarié, il n'aime pas qu'on lui dise non (et ça elle le sait très bien, l'a appris avec le temps: c'était son mot préféré, ça, non, quand ils sortaient ensemble).

Et il a vraiment envie de lui offrir ce cadeau, plus personnel que tous les autres avant. Bien moins agréable, il n'en doute pas, mais ça lui ferait vraiment plaisir de le lui offrir. De l'autre côté de la pièce, il peut presque entendre les méninges de sa mère se mettre en marche pour trouver de quoi il en retourne. Il se souvient du Noël dernier où elle refusait d'écouter ses recommandations pour savoir quoi offrir à Dalia alors qu'Evan savait pertinemment ce qui lui ferait plaisir. Sans doute qu'elle serait scandalisée de savoir ce qu'Evan a en tête, a mis dans une petite boîte couleur crème sur la table basse de la bibliothèque après que Crescentia ait fini de "nettoyer" le manoir. “ I'm sure you understand. ” Elle sait très bien que non, il n'aime ni être appropriate ou raisonnable, ça n'a aucune importance pour lui. En fait, il ne comprend même pas le principe, parce qu'il sait pertinemment qu'on lui pardonne . Parce qu'il est un Rosier, parce qu'il est Evan aussi. Parce qu'il est un sang-pur, parce qu'il fait peur. “ Hm. ” Ça l'importe peu, il est contrarié de ne pas pouvoir lui offrir son cadeau mais si elle préfère, si elle a peur, toute la famille peut les suivre aussi. Ce ne sera que plus désagréable pour elle au final. “ Why don't you keep it for your next victim Evan? ”

Il sourit en coin. Parce que ce cadeau est pour elle, voilà tout. Elle devrait mieux savoir. “ Why are you even here? ” Elle souffle, parle à voix basse, murmure comme si tout le monde ne retenait pas son souffle pour les écouter; Evan reste ostensiblement silencieux jusqu'à ce que les conversations reprennent, même si il ne s'embarrasse pas d'une vox basse quand il répond: “ I live here, Dalia, ” d'un ton absolument égal et nonchalant, haussant même une épaule comme si il n'aurait pas pu trouver une excuse à la dernière minute pour échapper à ce long et fastidieux dîner d'anniversaire pour un être qu'il méprise et par lequel il est obsédé dans les mêmes valeurs. “ This gift is for you and you only of course. I made it myself. ” Et non pas picked ou bought. Fait. “ It's important for me you have it. But if you're scared, ” il sourit un peu plus, d'un air insolent et moqueur. Si elle a peur, si elle est faible, si elle est lâche, alors: “ my brother can come with you, everyone can come with you. ” Nouveau haussement d'épaules nonchalant, ça n'a aucune importance pour lui au final, et si elle ne veut pas aller le découvrir maintenant, il l'enverra à la maison des Fawley pour qu'elle puisse le trouver sur le pas de sa porte. Il imagine sans mal Alessandra ouvrir le paquet sans se douter de rien, son cri étranglé qui forcerait son mari à venir voir de quoi il en retourne, son froncement de sourcils, Abel qui suit pour ne pas louper cette opportunité de savoir ce qui se passe, Dalia derrière eux, se frayant un chemin entre leurs corps pour arriver à l'encadrement de la porte et voir le cadeau de son ancien fiancé.

Evan sourit rien qu'à cette image dans sa tête, les quatre, pittoresques, idiots, pauvres Fawley sur le pas de leur porte, regardant avec des expressions surprises, dégoûtées, confuses, énervées, son cadeau d'anniversaire. “ But you don't have to. I guess, ” dit-il, grand prince, en secouant la main d'un air désinvolte. L'idée de lui envoyer le cadeau lui plaît intensément, il ne pense pas que ça le dérangerait d'avoir à le faire au final. Il espère juste que ses parents n'auraient pas le temps de détruire le cadeau avant que Dalia le voit. “ Cowardly, but not surprising from you. ” Il penche la tête sur le côté. “ Still disappointing, for some reason. ” Nouveau haussement d'épaules, il pense qu'elle n'a rien de plus à lui dire — elle n'a jamais été du genre à changer d'avis — alors il s'apprête déjà à se détourner et aller bouder dans son coin.

Evan ne répond pas, la patience déjà fine de Dalia s’effrite, elle n’est pas loin de se détourner pour rejoindre sa propre famille, quand les conversations derrière elle reprennent et qu’Evan ouvre enfin la bouche : “ I live here, Dalia, ” Elle roule des yeux, incapable de s’en retenir, fronçant le nez avec un temps de retard en s’en rendant compte. Il se moque d’elle, ce qui n’a rien de surprenant ni de nouveau, mais ça l’agace proprement malgré tout. Elle s’en fiche au fond, peu importe la raison de sa présence, peu lui importe lui tout court. Il aime l’embêter, il aime la faire rager, il a voulu la ruiner et y est parvenu. Elle sait bien qu’il vit ici, elle sait aussi très bien que s’il n’avait pas voulu assister à ce dîner il ne serait pas venu, aurait trouver autre chose à faire. Elle pense savoir également que ce n’est pas l’insistance de ses parents qui l’ont poussé à faire acte de présence, d’une part parce qu’Evan se fout de tout, même de leurs ordres, d’autre part parce que les Rosier non plus n’ont pas l’air d’apprécier leur interaction. “ This gift is for you and you only of course. I made it myself. ” Un cadeau fait-maison, donc. Ça a le mérite de l’intriguer l’espace d’une demi-seconde, mais elle s’en fiche, ça doit être un dessin vulgaire, ou quelque chose de cette trempe là. Rien qu’elle ait envie de découvrir en tous cas. “ It's important for me you have it. But if you're scared, ” Ce qui est important pour lui ne l’est pas pour Dalia c’est une nouvelle promesse qu’elle s’est faite, comme celle de le haïr pour toujours. En revanche ça l’agace un peu qu’il essaye de jouer sur sa fierté, pour la faire céder. Ça l’intrigue vaguement cette insistance pour qu’elle voit son cadeau — mais elle sait que ça ne peut qu’être indicateur d’à quel point celui-ci doit être odieux. Elle ne lui fait confiance que pour ça.“ my brother can come with you, everyone can come with you. ” Il hausse les épaules et elle l’imite après un court instant. Evan n’a jamais été doué pour accepter qu’on lui dise non et ça a toujours autant agacé que fait légèrement sourire Dalia, son inventivité pour contrer ses protestations. Ça ne la fait pas sourire aujourd’hui, ça l’énerve juste qu’il insiste alors qu’elle a déjà refusé. Elle est sincère, il peut donner son cadeau à quelqu’un d’autre ou le garder pour lui ou lui brûler ça lui est égal elle n’en veut pas. Ce n'est pas une question peur, ce n'est pas même question de ne pas vouloir être seule avec lui — et de toute façon tous les autres sorciers présents s'y opposeraient sûrement —, c'est juste qu'elle n'a pas, n'a plus de temps à perdre avec lui et ses jeux stupides et cruels.

Un sourire distrait passe les lèvres d’Evan comme s’il s’imaginait quelque chose de particulièrement plaisant, quelque chose qui sans aucun doute arracherait des frissons d’horreur à Dalia. “ But you don't have to. I guess, ” Non rien ne l’y oblige et il ne lui fait certainement pas une faveur en lui concédant ça.  “ Cowardly, but not surprising from you. ” Il penche la tête de côté, elle hausse les sourcils, ses doigts tressautent légèrement contre son flanc, mais elle ne dit rien ; elle s’en fiche de ce qu’il pense d’elle, qu’il la trouve lâche, qu’il pense qu’elle a peur. Dalia n’a pas peur, rien de ce qu’il peut lui faire ne l’effraye, elle n’a jamais eu et n’aura jamais peur d’Evan. À tort peut-être. Sûrement. Elle ne doute pas un seul instant que son cadeau, quel qu’il soit, ne lui plaira pas et elle n’a aucune raison de vouloir s’infliger ça, fierté ou pas. De toute façon Evan lui a déjà volé tout ça, l'a déjà humiliée, bafouée, ruinée, aux yeux du monde si ce n'est d'elle-même, alors un peu plus ou un peu moins, aucune différence pour elle. “ Still disappointing, for some reason. ” Il hausse encore les épaules et cette fois elle le regarde dans le blanc des yeux sans l’imiter. Si elle pouvait elle le repousserait du plat de la main et le planterait là. Convaincre Evan Rosier de laisser tomber quelque chose qu'il a en tête n'est pas une mince affaire elle le sait et n'a pas l'énergie pour, surtout si elle est censée mâcher ses mots. “ Your disappointment means nothing to me. ” fait-elle froidement, les dents serrées. Evan lui-même ne vaut plus rien à ses yeux. Ne doit plus rien valoir en tous cas. Elle sait déjà qu’il la méprise, qu’il la déteste, qu’il s’est joué d’elle tout du long, peu lui importe d’ajouter une quelconque déception à ça. De toute façon, Evan ne l’a jamais estimée, il n’est sûrement pas déçu le moins du monde. C’est différent de son côté à elle, mais plus pour longtemps. “ Much like your gift which you can sho- — Dalia dear, why don’t you and Abel go with Evan see what all the fuss is about.” L’interrompt sa mère avant que Dalia ne commette une énième faute et insulte Evan devant toute sa famille. Elle peut bien voir qu’Alessandra n’a pas plus envie qu’elle de l’envoyer et de faire plaisir à Evan comme ça, personne n'a envie qu'elle ouvre ce cadeau dont même le couple Rosier n'avait pas l'air de connaître l'existence, mais comme toujours elle fait ce qu’il y a de mieux, ce qui froissera le moins l’étiquette. Pendant une seconde, Dalia contemple l'idée de résister, de rappeler qu'elle n'en veut pas du tout de ce cadeau, mais tous les regards sont sur elle et personne ne semble vouloir (pouvoir) protester: ça semble être la seule option acceptable, le seul moyen de faire taire Evan, aussi. Abel a l’air encore plus mécontent que sa cadette, mais n’a, semble-t-il, pas trop le choix non plus. Quand il vient les rejoindre, son regard noir est vissé sur Evan. “ I was meaning to say you can shove it up your ass whatever your stupid gift is. ” fait-elle dès qu'ils sont dans le couloir, Evan devant eux pour montrer le chemin, Abel à son flanc comme s'il craignait d'être semé. S'il est gêné par les propos de sa sœur il n'en montre rien, et même, dans le regard en coin qu'il lui jette elle croit presque voir un soupçon de fierté.

Evan n'aime pas ne pas avoir ce qu'il veut. Il n'a pas aimé la première fois qu'elle l'a repoussé en lui demandant de laisser le temps au temps. Il n'a pas aimé toutes les fois où elle a enserré son poignet de ses doigts pour empêcher ses doigts remonter le long de ses jambes. Il n'aime pas quand on le repousse, quand on le contrarie, quand on lui dit non: Dalia, a-t-il remarqué rétrospectivement, a toujours eu le don de le faire en douceur, de lui promettre autre chose apte à effacer sa moue boudeuse. Pas cette fois, ceci dit. Il aimerait dire que ça ne l'affecte pas mais c'est le cas. Pas dans le bon sens du terme. Il a envie de casser quelque chose. “ Your disappointment means nothing to me. ” Rien qu'il pourrait jamais lui donner aurait de la valeur, de toutes façons, alors ça n'arrache qu'un reniflement à Evan. Ceci dit, il sait qu'il a eu de la valeur à ses yeux, à un moment ou à un autre — trop tôt, ou trop tard, il ne sait pas encore vraiment. Mais forcément qu'il a compté à ses yeux — ou du moins l'homme qu'il a créé, l'Evan dans la peau duquel il se glissait pour la séduire, pour la faire sourire, sachant pertinemment qu'à chaque fois qu'il revenait dans son dortoir, qu'il était de nouveau seul, cette peau glissait sur lui comme l'artifice que c'était. “ Much like your gift which you can sho- — Dalia dear, why don’t you and Abel go with Evan see what all the fuss is about. ”

Alessandra, toujours sa sauveuse. Il y a une expression ennuyée sur le visage d'Evan — il n'a jamais vraiment estimé Abel avant et maintenant qu'il ne doit même plus faire semblant de lui accorder un quart de son attention, c'est pire. Mais finalement, comme tout le monde semble agréer que, même si ce n'est pas une bonne idée, il vaut mieux jeter un os au lion que le garder plus longtemps ennuyé dans sa cage, un énorme sourire vient éclairer son visage; lui donne une allure enfantine, gamine, presqu'autant que cryptique. “ Wonderful, ” fait-il avec entrain en claquant ses mains ensemble alors qu'Abel vient les rejoindre, les yeux d'Evan s'attardant sur lui un peu plus longuement qu'à l'ordinaire. Si à l'origine il ne lui offrait qu'un mépris volontairement à peine dissimulé sous une couche de politesse pincée, désormais, son regard brûle de quelque chose d'autre. De la moquerie, parce qu'ils ont un secret qui passe au-dessus de la tête de Dalia, quelque chose qu'ils partagent et qui donne encore plus de pouvoir à Evan sur lui. Tant mieux.

Ils sortent de la pièce, Evan menant le chemin avec une démarche presque énergique pour une fois, véritablement ravi. “ I was meaning to say you can shove it up your ass whatever your stupid gift is. ” Evan lui jette un regard par-dessus son épaule, même sa vulgarité ne saura pas entamer sa bonne humeur. “ I got that, don't worry, ” fait-il d'un ton léger en leur ouvrant la porte pour la bibliothèque, la pièce préférée de Dalia, où est gardé le cadeau. “ A bit harsh. ” Il la laisse passer, tenant toujours la porte, faisant mine de se pencher vers elle et souriant quand elle s'écarte; quand ses doigts se posent dans ceux d'Abel, ils s'y vissent vicieusement. “ We didn't get to catch up since my last letter, Abe. ” Les muscles qui jouent sous la peau d'Abel, au niveau de sa mâchoire, sont absolument hilarants; le sourire d'Evan s'approfondit alors que Fawley met en laisse sa colère et serre les poings. Evan lui a promis de ne rien dire, dans sa dernière lettre, à quiconque, à condition qu'il ne s'ennuie pas. Et quand ça sera le cas... il a tendance à être impulsif quand il s'ennuie. Et destructeur.

Il referme la porte derrière et se désigne à Dalia la boîte, joliment enveloppée d'un beau papier cadeau au motif très festif et coloré, son cadeau d'anniversaire. Il y a même une carte, écrite de sa main: Dalia d'un côté et A token of the great times we had together. x Evan, de son écriture cursive et un peu maladroite, malhabile. “ Come on then, ” lui dit-il en venant se poster à côté d'elle et en observant son visage avec impatience. “ Happy birthday, Dalia. ”

Les mots de Dalia n'atteignent pas Evan autant qu'elle le voudrait et c'est stupide bien évidemment de s'être attendu à ce que ce soit le cas, quand il semble tout à fait clair qu'elle n'est rien pour lui et que de la même façon qu'elle-même prétend que tout ce qui vient de lui n'a aucune valeur pour elle, ça semble être vrai du côté d'Evan. La bonne humeur qui irradie littéralement de sa personne inquièterait presque un peu Dalia. Elle s'attend déjà au pire de ce cadeau et ne compte certainement pas offrir à Evan la satisfaction de la voir déstabilisée ou rageuse ou quoi que ce soit d'autre que parfaitement indifférente. Elle n'a toutefois aucun contrôle sur la potentielle esclandre qui pourrait en résulter entre son frère et Evan, et ça, ça la rend un peu nerveuse. “ I got that, don't worry, ” elle fronce le nez en masquant du mieux qu'elle peut sa déception devant son ton si léger — de toute façon il lui tourne le dos — ses mots n'ayant pas eu l'impact espéré. Tant pis, au moins l'ont-ils brièvement soulagée elle. C'est à la bibliothèque qu'il les amène, le cœur de Dalia se serrant légèrement dans sa poitrine quand elle s'en rend compte. Elle se souvient encore de sa première visite, de sa découverte un peu fascinée de cette pièce vouée à devenir sa préférée de tout le manoir. Elle se souvient des sentiments dont elle était agitée quand elle y a fait ses premiers pas, de la façon qu'elle a eu de le retenir sur le pas de la porte en sortant, pour enfin profiter du gui accroché dans l'encadrement de cette dernière. Ça ne fait même pas encore un an, mais ça lui semble loin désormais tellement loin. Comme une autre vie. Et le Evan qui lui fait face lui fait l'effet d'être un tout autre homme même si, force est pour elle de constater, d'admettre avec toute l'amertume du monde, que c'est là sa vraie face et tout le reste, un mensonge.

“ A bit harsh. ” Elle le dépasse pour rentrer, repère tout de suite la boîte enrobée d'un joli papier cadeau — pas le style d'Evan justement qui n'a jamais pris ce soin avant — posée sur la même table que le cadeau de Noël qu'il lui a fait l'année passée. Qu'elle a encore dans sa chambre. Qu'elle devrait penser à jeter. “ We didn't get to catch up since my last letter, Abe. ” Elle se retourne brusquement quand elle entend Evan s'adresser directement à son frère, s'attendant déjà à ce qu'Abel rétorque quelque chose de désagréable et que tout ça se finisse comme ça a commencé : mal. Son frère reste de marbre pourtant, ou essaye vraiment de l'être. Dalia fronce un peu les sourcils surprise, faisant également soudain sens des mots d'Evan. Il a envoyé une lettre à son frère. Étrange, celui-ci ne lui en a jamais parlé. Elle peut deviner que le contenu n'était pas agréable, s'apprête déjà à demander de quoi il en retourne, piquée par la curiosité et prête à prendre la défense de son frère si ce dernier essaye — curieusement car Dalia sait qu'il n'aime pas Evan — de ne pas se laisser provoquer, mais déjà son ancien fiancé lui désigne la boîte sur la table et Dalia se laisse pour une fois rappeler à l'ordre. Elle n'aime pas beaucoup que la porte ait été fermée derrière eux, ni la satisfaction sur les traits d'Evan qui ne peut qu'être de mauvaise augure pour elle. Elle est là parce qu'on l'a forcée, elle compte ouvrir son cadeau et tourner les talons sans demander son reste, elle n'a pas de temps à perdre avec lui.

Elle s'approche avec agacement, des images de l'autre boîte pas emballée mais si jolie et contenant un cadeau si parfait et personnel et…rien avoir avec ce qu'il a prévu pour elle cette fois, elle n'en doute pas. Elle jette à peine un coup d'œil à la carte qui porte son nom, A token of the great times we had together. x Evan, reniflant avec ce qui ressemble à du dédain. “ Come on then, ” Evan s'approche d'elle et elle sent son regard avide sur son visage, comme la dernière fois. Elle se hait tellement de penser à ça. “ Happy birthday, Dalia. ” Sa mâchoire se resserre, il n'y a rien d'heureux à son anniversaire ni à cette situation, mais elle vient tout de même déchirer le papier cadeau sans y mettre le moindre soin. Elle veut être la plus rapide et clinique possible. Elle ouvre la boîte toujours impassible et s'arrête à peine une seconde en découvrant un tissu blanc apparemment ordinaire dans la boîte. Elle tourne le visage vers Evan, suffisamment confuse pour que ses traits le montrent. “ What is it? ” Mais il lui fait simplement signe de poursuivre son déballage alors elle attrape un pan de tissu doux, très doux, sous ses doigts fins. Du satin. Du satin blanc. Une robe de mariée ? Non, bien sûr que non. Elle soupire un peu, faisant tout un spectacle de son agacement qui n'a de toute façon pas besoin d'être exagéré quand elle déplie le tissu jusqu'à comprendre qu'il s'agit d'un drap. Abel s'est approché lui aussi et semble au moins autant perdu qu'elle jusqu'à ce que…leurs yeux tombent exactement au même moment sur la petit tâche écarlate qui gâche l'immaculé du drap. Ses doigts se dénouent aussitôt et il tombe mollement à ses pieds alors qu'elle sent chacun des muscles de son corps se tendre avec force, comme la corde d'un arc.

Elle s'était promis de pas réagir, de ne pas lui faire ce plaisir. Elle s'était promis d'être impassible, elle pensait être prête à tout. Mais Evan est tordu et pourri comme rien ni personne. Elle n'aurait jamais pu s'imaginer ça. Sa mâchoire est douloureuse, ses dents trop serrées, elle retient tout juste ses doigts de former deux poings. Étrangement, une pensée totalement innocente et presque déplacée en cet instant précis lui traverse l'esprit : elle ne savait pas qu'elle avait saigné, ce soir-là, quand elle s'était finalement offerte à Evan. A token of the great times we had together. x Evan Elle pourrait le frapper. Dalia doit faire des efforts depuis ce great time là. Elle doit se racheter auprès de ses parents, auprès des Rosier un peu. Et elle s'est jurée de le faire pour le bien de sa mère, au moins. Elle est prête à tout jeter au vent toutefois quand elle repose enfin les yeux sur Evan, son sang bouillonnant dans ses veines d'une rage telle qu'elle n'en a jamais connu (bien loin de la chaleur toute différente qui l'avait prise en décembre dernier dans cette même pièce). Il y a un peu d'embarras aussi, à l'idée que son frère soit-là, voit ça lui aussi, c'est comme une traînée humide et froide le long de son échine, mais Dalia préfère encore se laisser guider par la rage. C'est bien plus facile que d'admettre qu'elle puisse être humiliée, blessée. “ Fuck you. ” Abel semble enfin réaliser ce qu'il a sous les yeux, son visage perdant toutes ses couleurs et Dalia espère presque qu'il va frapper Evan comme elle-même en crève d'envie. Elle reprend avant qu'il n'en ait le temps toutefois se rappelant que ses hurlements sont exactement ce qu'attend Evan. “ I stand by what I said though. Give it, use it with someone else, turn the whole thing red for all I care. It's kind of pathetic for you to have kept it to be honest. ” fait-elle dont plutôt, d'une voix calme, mais acide, se forçant à détendre ses muscles un à un. Si elle pouvait, rien qu'une fois, planter ses ongles dans la peau de son visage.

Evan est tellement impatient qu'il en s'agiterait presque physiquement; à la place, tel un notaire zélé faisant l'état des faits, il se tient près de Dalia avec un regard d'aigle et un sourire presque encourageant, les mains nouées dans le dos, son expression devenant presque extatique quand le papier cadeau pourtant si proprement fait (il n'y a, évidemment, pas touché, laissant aux elfes le soin d'emballer son si cher cadeau) est déchiré sans remord par Dalia et le drap blanc révélé. “ What is it? ” Il lui fait simplement signe de poursuivre, ne faisant pas confiance à sa voix en cet instant précis, et il lit bien sur visage de Dalia qu'elle sait que ce qui le rend heureux et l'amuse ne peut être que de mauvais augure pour elle. Elle s'empare du drap et l'observe sans comprendre, Evan en couinerait presque de plaisir quand elle le déplie lentement pour l'observer dans toute sa grandeur et qu'enfin, la tâche écarlate au centre du satin est révélée au grand jour.

C'est bien stupide, parce que ce n'est même pas le même drap que celui dans lequel ils ont couché ensemble. Il a été brûlé, ou perdu, ou nettoyé; Evan l'ignore, mais il a pensé à l'image de Dalia déballant son cadeau, son cadeau se révélant être un souvenir de leur nuit ensemble, et ça l'a fait tellement rire qu'il a dû fabriquer la chose: un peu de sang et c'était chose faite, il a fait plusieurs essais avant d'être satisfait. Et l'effet semble être réussi parce que toute couleur quitte le visage de Dalia alors que, semblant comprendre ce que c'est, elle relâche le drap qui retombe mollement à ses pieds. Elle n'a pas saigné, cette nuit-là — du moins Evan ne pense pas, en tout cas, elle n'a pas laissé de trace derrière elle, ni sur le lit ni dans sa vie ni dans son coeur — et elle en a l'air exsangue en cet instant précis, ses yeux tempétueux tombant sur lui qui sourit toujours comme un bienheureux, sachant pertinemment qu'elle essaie de juguler ses émotions pour ne pas les laisser transparaître, espérant qu'elle trouve ça plus difficile encore quand il sourit ainsi. Elle doit être énervée, il aime bien quand elle est énervée, surtout envers lui a-t-il remarqué quand ils se voyaient. Ça l'amuse, elle est comme un chaton qu'on aime embêter juste pour en tirer des réactions; mais il n'a jamais cherché à tant l'agacer qu'en cet instant précis. Ce n'est même pas de l'agacement qu'il veut de sa part. C'est de la colère et de la rage et de la violence, quelque chose qu'il comprend, quelque chose qu'il ressent en permanence.

“ Fuck you. ” C'est un bon début. Le sourire d'Evan ne faiblit pas une seule seconde, surtout quand il tourne rapidement le regard vers Abel et voit que celui-ci est devenu aussi blême que le drap désormais parterre. “ I stand by what I said though. Give it, use it with someone else, turn the whole thing red for all I care. It's kind of pathetic for you to have kept it to be honest. ” Il rit — il ne l'a pas gardé après tout, n'a fait que le créer —, très simplement, un son carillonnant et léger. “ Pathetic? You think I'm the one being pathetic right now? ” Il secoue la tête, comme si elle venait de dire une bonne blague. “ You and your family are pathetic, coming here like you're our equals. Your blood is pure, or so you say, but everyone knows you're nothing more but beggars and cowards. ” Le visage d'Abel, qui était bien pâle, devient rouge et Evan voit ses mains se serrer, la jointure de ses poings blanchir. Dalia est fière, il l'a rapidement appris, et ça semble être un défaut mortel pour son frère aîné qui a presque l'air d'être incapable de rester en place en entendant Evan: parfait. “ You'll never have the shoulders to carry your family name and take it from where it lies in the mud, Abel, and you, ” fait-il en se tournant vers son ancienne fiancée, ” are nothing but a cock-loving slu-- — Is everything okay? ”

Son père. Toute l'attitude d'Evan change, comme une vague effaçant des dessins tracés au doigt sur le sable d'une plage. Le sourire devient moue, il se renfrogne et son dos se voûte, il détourne le regard et il a l'air sur le point de grogner, comme une bête sauvage, comme un loup n'osant pas affronter le chef de la meute. Le regard de son père n'a jamais été aussi sombre, ses sourcils froncés au-dessus de ses yeux couleur orage vissés sur Evan. “ Everything's alright, father, Dalia was just telling me how much she liked my gift. ” Il désigne le drap au pied de sa future belle-fille. “ A good reminder of our times together. ” Si son père avait l'air curieux, et rassuré à la fois, de voir que le cadeau n'était qu'un bout de tissu, il a soudainement l'air inquiet et agacé, regardant son fils en sachant pertinemment qu'il est capable de tout et son contraire à la fois. “ Why are you being shy, Dalia? Go on then, show him, he wants to see. ”

Evan ne semble pas trop heurté par ses propos, au contraire il ose rire de sa remarque, de son insulte. Rire de sa rage et de sa haine, les nourrissant toutes deux au passsage.  “ Pathetic? You think I'm the one being pathetic right now? ” Elle garde le menton levé malgré tout Dalia, même si elle n’aime pas du tout son rire et la façon qu’il a de rester sûr de lui. Il semble tellement inatteignable et ça l’enrage tellement qu’il sache encore la toucher elle, même si ce n’est que pour allumer une fureur telle qu’elle n’en a jamais connue en elle. Il sait encore tirer les réactions qu’il veut d’elle, tirer des réactions tout court alors que lui, lui elle ne l’a visiblement jamais ni compris ni même connu. “ You and your family are pathetic, coming here like you're our equals. Your blood is pure, or so you say, but everyone knows you're nothing more but beggars and cowards. ” Les ongles de Dalia sont si bien enfoncés dans ses paumes qu’elle va certainement en saigner bientôt, mais elle ne peut pas, elle n’a pas le droit de lever la main sur lui, même si ça la démange affreusement, de juste écraser sa paume avec violence sur sa joue, recourber ses doigts pour y enfoncer ses ongles et tirer tirer jusqu’à laisser quelques traits rouges sur son visage cireux. Evan sait qu’il provoque ça en elle, il sait qu’elle déteste qu’on parle de sa famille comme ça, qu’on lui rappelle leur pauvreté. Ils sont fiers malgré tout, elle comprise et Dalia ne doute pas une seconde qu’il s’en rappelle, qu’il dit ça exprès, qu’il doit être ravi de la rage dans ses yeux sombres, qu’il s’en nourrit en un sens, comme le monstre qu’il est. Elle se force à se calmer, elle ne peut pas lui donner ce qu’il veut et même si elle hait qu’on s’en prenne à sa famille, elle doit se rappeler que l’opinion d’Evan n’a aucune valeur et surtout pas pour elle. “ You'll never have the shoulders to carry your family name and take it from where it lies in the mud, Abel, and you, ” Dalia en tremble presque de rage, se demande comment et pourquoi Abel lui même se retient, lui qui a toujours détesté Evan et n’a jamais fait d’effort pour le masquer. ” are nothing but a cock-loving slu-- — Is everything okay? ” Tout le corps de Dalia est agité d’un spasme alors que sa main était sur le point de fendre les airs pour trouver le visage de son ancien fiancé et au diable la raison. Il le mérite sans aucun doute il le mérite et son père qui vient de l’interrompre doit le savoir, il doit avoir entendu. Cock-loving slut. Dalia a les veines glacées. Elle sait qu’on la voit comme ça, qu’on peut dire ça d’elle sur son passage, qu’on peut l’insulter, dire que c’est une fille facile une traînée, même si d’autres font bien pire — l’important est de ne pas se faire prendre. Evan a fait en sorte que ce soit le cas ceci dit. Après qu’elle ait fait durer le plaisir, l’ait fait attendre, il a choisi le lit paternel exprès. Il l’a gâchée. C'est ainsi que beaucoup voient les choses en tous cas. C'est de sa faute à lui. Et elle ne déteste rien de plus que cette idée terrible qu’elle n’aurait pas tant regretté — ni regretté du tout — s’ils ne s’étaient pas faits prendre, ou plutôt, si Evan lui-même n’avait pas changé du tout au tout après ça.

“ Everything's alright, father, Dalia was just telling me how much she liked my gift. ” Elle peut voir que la présence du père l’affecte, même s’il reste plutôt confiant, plutôt culotté aussi d’oser attirer l’attention vers son cadeau qui risquerait bien d’enrager les Fawley s’ils le voyaient — assez pour rompre l’alliance ? “ A good reminder of our times together. ” Elle pince des lèvres, ravale difficilement toutes les insultes qui lui pendent aux lèvres et repousse du bout du pied le drap qui l’effleure encore. “ Why are you being shy, Dalia? Go on then, show him, he wants to see. ” La mâchoire de Dalia se resserre, que ne donnerait-elle pas en cet instant précis pour que Rosier Senior disparaisse et qu’elle soit seule avec Evan pour lui hurler sa haine et transformer pour la première fois de sa vie sa main en poing et l’écraser contre sa sale assurance ? Elle le hait tellement et déteste l’hypocrisie de la bienséance qui l’empêche de le montrer ou au moins de l’ignorer, de tourner les talons. Elle ne sait même pas ce qu’elle est censée faire désormais mise dans une impasse : elle ne peut pas s’énerver et elle ne peut pas non plus ignorer Evan et elle ne peut pas non plus montrer à son futur-beau-père ce que son démon de fils a fait. Elle se tourne vers Rosier Senior en forçant ses traits à se détendre un peu même si ses yeux trahissent encore son agitation. “ Your son offered me a great gift indeed. ” Elle le repousse un peu plus du pied, s’en éloigne en attrapant le bras de son frère, geste naturel en apparence, mais nécessaire surtout, elle a besoin de soutient. “ Clarity, as to what the House of Rosier stands for. ” Elle pince des lèvres, laisse voir qu’elle est bien moins que ravie de la conclusion qu’elle en a tiré. Le père de ses fiancés actuel comme passé lui fait peur. Elle imagine qu’il ferait peur à tout le monde, mais elle sait qu’il ne peut pas la toucher, pas encore en tous cas ; elle sait aussi…elle a vu quelques traces sur le corps d’Evan. Les a embrassé, pour certaines. Elle n’a pas de remords à avoir à attiser les foudres du paternels sur Evan, à le dénoncer, il le mérite, il l’a même cherché après tout. Il semble fier de son cadeau et elle ne va pas non plus le couvrir contre son gré.  “ Or maybe I just don’t share the humour. Maybe you will. Evan, care to explain to your father? I’m sure the humour is lost on me, I wouldn’t know how to make it funny. ” La moindre réticence qu’elle pourrait ressentir n’aurait aucun sens, ou alors, essaye-t-elle de s'en convaincre, ne serait due qu’à sa simple aversion générale pour la violence. Elle esquisse un faible sourire, adressant à peine un regard à Evan, déjà prête à rejoindre le salon avec son frère et à l’ignorer pour le reste de la soirée et, si possible, de sa vie. Cock-loving slut. Si son père et Abel n’avaient pas été là elle aurait presque pu sourire et lui dire que non, justement, la sienne n’a pas reçue l’amour de ses lèvres qu’elle aurait sûrement voulu, pour ça peut-être qu’il semble aussi contrarié. Peu importe toutefois, même si le remettre à sa place serait satisfaisant sur le moment, Dalia pense qu’Evan serait capable de rire encore, de trouver à l’insulter encore, de rendre la chose interminable, quand elle, tout ce qu’elle veut c’est mettre un point final à ce qu’ils ont été.

Evan se demande si Dalia va oser montrer à son père le cadeau qu'il lui a fait. De mauvais goût sans aucun doute, et certainement scandaleux; Evan trouve ça hilarant, surtout que c'est plus pour le geste qu'autre chose qu'il a offert ça à Dalia, voulant la provoquer, la forcer à réagir à sa présence d'une manière négative. Evan est presque heureux de récolter la haine des autres, leur mépris, surtout celui de Dalia, il ne mérite que ça et il veut vraiment qu'elle pense qu'elle sera toujours incapable de ressentir quoique ce soit d'autre pour lui. Dalia déglutit et se tourne vers le maître de la maison, le patriarche des Rosier. “ Your son offered me a great gift indeed. ” Elle repousse le drap du bout de son escarpin, Evan sourit, elle ne montre pas vraiment la même dévotion à ce cadeau qu'elle a montré aux autres. Elle s'accroche au bras de son frère, il se demande si le geste est naturel ou nécessaire, pour elle comme pour lui, il peut voir qu'Abel est agité d'une tension frémissante, les poings fermés le long de ses flancs, ses yeux vissés sur Evan qui arque un sourcil dans sa direction, le défiant de s'approcher. Evan n'est jamais contre une petite bagarre, mais Abel sait aussi qu'il détient un lourd secret à son propos, quelque chose qu'il préférerait que Dalia n'apprenne pas encore, si ce n'est jamais.

“ Clarity, as to what the House of Rosier stands for. ” Les yeux d'Evan reviennent sur Dalia, qui pince des lèvres d'un air désapprobateur. Elle ne va pas s'attirer les faveurs de Sr. en laissant entendre que son opinion des Rosier n'est pas des meilleures; mais elle est maligne, aussi, de renvoyer sur lui la responsabilité de ce contempt, à cause de son cadeau. Evan serre les dents. Il est grand, il est plus qu'un adulte, mais il vit encore au manoir et si il est trop contrarié, il va encore subir les représailles de son père. “ Or maybe I just don’t share the humour. Maybe you will. Evan, care to explain to your father? I’m sure the humour is lost on me, I wouldn’t know how to make it funny. ” Evan grogne un peu. “ Coward, ” lâche-t-il, le mot enveloppé de mépris alors que son père tourne vivement la tête vers lui: “ Evan. ” Sa voix est tendue de menace, sèche et autoritaire, envoie un frisson le long de l'échine d'Evan — muscle memory. Finalement, de mauvaise grâce, Evan s'approche du draps posé parterre, jetant des regards assassins à Dalia qui l'ignore. En revanche, il remarque avec joie qu'Abel devient presque blême à mesure qu'il se rapproche, entravé par sa soeur, mais pour combien de temps? “ I think you might not get the emotional appeal of the gift, father, it's a very personal one. ” Sachant pertinemment qu'Abel l'observe, Evan appuie son regard sur Dalia, pas juste sur son visage mais sur tout son corps, de haut en bas. “ I hoped it would remind you... of good times, Dalia. ” Et quels bons temps, il n'a pas besoin de le préciser quand il la regarde comme ça.

Il a presque l'impression de voir Abel sur le point de s'échapper à l'emprise de sa soeur; mais elle tient bon et Evan, déçu, attrape les deux coins du draps avant de lever les bras pour montrer le tissu blanc, teinté de rouge, en se tournant vers son père. “ Get it? It's the sheets from your bed, the sheets I fucked that whore on. ” Le choix de mot est disgracieux, trouve-t-il, mais a sa parfaite utilité quand Abel se dégage brusquement de l'emprise de Dalia, avale d'un pas la distance entre lui et Evan, et écrase son poing contre sa figure.

Il pourrait presque en rire mais il n'en fait rien, se laissant tomber à la renverse en lâchant le drap, sa main se levant presqu'aussitôt à sa mâchoire alors qu'il pousse un couinement pathétique de douleur. Il aimerait lui dire qu'il frappe comme une fiotte mais ce serait faux, il a véritablement mal; il est juste satisfait qu'Abel l'ait frappé comme il le voulait. “ He hit me. He hit me! ” Ce qui lui donne une assez bonne raison pour sortir sa baguette, le geste imité par Abel avec une seconde de retard. Evan ne prend pas le temps d'incanter, son père l'interrompant avant: “ enough! ” Il doit réprimer un sourire malgré lui. “ Hot temper eh? ” fait-il en regardant Abel, priant presque pour que celui-ci finisse ce qu'il vient de commencer de son poing. “ Runs in the blood from the likes of you, doesn't it? ” rajoute-t-il d'un ton méprisant et méprisable à la fois, faisant référence à leurs origines lointaines qu'ils détestent entendre mentionnées.