rosier - without warning.

without warning ϟ He wanted to care, he wanted to care so badly, but there was this gap between what he felt and what he wanted to feel, a space where something important had been carved out.

Tu n'as pas honte? n'arrête pas de lui demander Crescentia, et Evan se contente de rire au visage de sa mère, non, il n'a pas honte, je te l'ai déjà dit cent fois, il n'arrête pas de le lui répéter. Non, il n'a pas honte, il a eu ce qu'il voulait: la virginité de Dalia. Rien d'autre ne compte à ses yeux, il n'y a rien qu'elle aurait pu lui donner qu'il l'aurait intéressé. N'est-ce pas?

Parfaitement. Evan était plutôt content de lui jusque là. Sa famille le déteste, et alors? Ils ne l'ont jamais compris, ne l'ont jamais aimé (qui l'a fait?). Les Fawley les déteste, et alors? Il aimait bien Alessandra mais ce qu'il devait faire allait bien au-delà des sentiments de son ex-future-belle-mère. Il devait le faire. Déjà parce qu'il en avait envie. Ensuite parce que... il n'a pas envie d'y penser. Dalia ne fait plus partie de sa vie, les fiançailles ont été brisées, il a pris la Marque, il est un nouvel homme. Dalia fait partie de Poudlard, de l'adolescence, des erreurs réalise-t-il en se souvenant de tout ce qu'ils ont fait ensemble, de ce qu'il a fait pour elle surtout. Ça le dégoûte quand il y repense, qu'il ait pu être si... si attentionné et patient et presque gentil avec quelqu'un. Heureusement, il pense que Dalia aurait presqu'autant honte que lui et ne le dira à personne. Tant mieux.

Il était bien décidé à profiter de son été, à préparer le mariage d'Avery — sauf qu'il est tombé malade, cet incapable, et que le mariage va être repoussé — et à s'entraîner en duels et à faire quelque chose de sa vie jusqu'à l'annonce. Les Fawley ont fini par convaincre son père. Si ils ne peuvent pas avoir l'aîné (et qu'ils n'en veulent plus), ils auront le cadet. Et leurs parts dans l'entreprise de Richard Rosier, quoiqu'il arrive.

Luke. Fiancé à Dalia.

Il s'est attendu à ce que son frère proteste. Ou Dalia. Mais non. Ils semblent tous les deux accepter ces fiançailles sans aucun problème. Mais il est... Evan repense à Alfie, cet immonde personnage, et ça le rend malade. Et Dalia... non, Dalia n'a pas le choix, elle doit détester Luke et tout ce qu'il représente. Pourquoi voudrait-elle être associé à lui, Evan, même indirectement? Ou aux Rosier en général? Il n'y a pas cru au début. Il pensait que c'était une blague.

Mais non, c'est réel. Luke et Dalia sont fiancés. Ils vont se marier. Evan l'a appris au dîner, partageant sa table avec ses frères et ses parents, un verre de vin à mi-chemin vers sa bouche. Il s'est attendu à ce que son père rit et se détende. Mais non, rien. Richard Rosier se contente de retourner à son steak alors que sa femme Crescentia cache sa moue déçue (elle pensait enfin s'être débarrassée des Fawley) derrière sa serviette. Evan regarde Audran, puis Luke.

Luke. Voleur de père, voleur de fiancées. Et une putain de pédale avec ça.

Evan ne finit pas son assiette, il la repousse brutalement et quitte la salle à manger sans un regard en arrière; contrairement à son habitude, son père ne l'arrête pas, il doit savoir que ce serait une mauvaise idée au final. Evan sait que Luke ne fait pas exprès. Mais il a toujours eu l'impression que ses parents le préféraient. Bien entendu, ils préféraient Audran (comment les blâmer? parfait, stupide, petit Audran), mais Evan est toujours arrivé bon dernier dans leur coeur, il le sait bien, c'est injuste parce qu'il est le premier-né. Il aurait dû être le premier marié, l'hériter, adoré, adulé, un modèle pour ses jeunes frères. Mais quelque chose a commencé à clocher en chemin.

Il est le premier Marqué, lui rappelle son bras toujours un peu plus lourd depuis qu'il a reçu la Marque. Le premier Marqué et le seul, pour l'instant. La pensée que ses frères puissent eux aussi devenir des Mangemorts le rend fou de rage. Luke serait bien capable de lui voler ça aussi. Quand les autres ont fini de manger, il n'hésite pas une seule seconde à rejoindre Luke dans la bibliothèque — il a remarqué qu'il y passait souvent son temps, ces derniers jours, peut-être qu'il est en train de dévorer un énième livre stupide, Evan s'en fout. Il est juste heureux de l'y trouver seul et de pouvoir le prendre par le col et le plaquer au mur derrière lui. Audran et Luke ont toujours été plus grands que lui, le premier de dix centimètres, le second presque de vingt. Mais ce qu'il n'a pas en carrure, Evan compense en rage et en violence, alors qu'il enfonce sans aucune hésitation ses poings contre la gorge de Luke, ses doigts fermement ancrés dans le col de sa chemise. Il est calme, pourtant, quand il parle: “ est-ce que tu as perdu tout forme de dignité et t'es donc résigné à récolter mes miettes? Si c'est le cas, je suis très déçu, Luke. ” Il raffermit un peu son emprise sur lui. “ Qu'as-tu fait avec les Fawley? ”

Il n’avait pas voulu de ça, de tout ça. Il n’avait pas désiré se retrouver fiancé à l’ancienne promise de son frère, avec la cousine d’un type qu’il avait aimé (aimé toujours ?). Il n’avait pas désiré non plus se retrouver enchaîné à une jeune femme qui le méprisait, pour sûr. Lui et Dalia n’avaient jamais été proches, n’avaient jamais été amis. Déjà du temps où tout semblait aller comme une rivière tranquille entre elle et Evan, elle ne l’avait jamais vraiment supporté. Trop enfantin, trop immature que ce cadet qui passait son temps à faire chier son monde à Poudlard et à accumuler les retenues, loin de ce qu’une femme pouvait souhaiter pour un marin convenable. Il n’avait rien demandé mais il n’avait pas vraiment eu le choix, comme beaucoup d’entre eux, alors il s’était contenté d’acquiescer, comme un automate bien dressé, les traits un peu trop tirés et le sourire un peu trop crispé. Ramasser les miettes de son aîné n’était pas pour lui plaire, vraiment, lui qui avait toujours eu le sentiment de vivre dans son ombre. Une fois de plus, il n’arrivait qu’en second sur la liste et ça le rendait fou de rage, une rage qu’il dissimulait derrière des airs affables de faux semblants… Quand ses parents l’avaient annoncé officiellement, au repas, ce soir-là, ça n’avait tiré qu’un sourire follement amusé par la situation à Hippolyte, mais il n’en avait pas attendu moins de lui. Il avait davantage été surpris par la réaction d’Evan, lequel avait brutalement quitté la table en repoussant son assiette. Il n’avait pas compris, le cadet, pourquoi son frère se montrait aussi contrarié à ce sujet ; après tout, c’était lui qui avait tout fait pour rompre ses fiançailles avec Dalia, pas vrai ? Pourquoi s’être donné tout ce mal s’il aurait préféré la conserver pour lui ? Il avait reposé lentement sa fourchette, l’appétit coupé, incapable de plus rien avaler. Il avait pensé, à la fin, du repas, se rendre dans la chambre de son aîné, cherché à comprendre, mais l’humeur morose qui avait semblé être la sienne l’avait dissuadé et c’était en soupirant qu’il s’était rendu à la bibliothèque familiale…

Il n’avait jamais été très adepte de la lecture mais il y avait tellement de choses à évacuer dans sa tête que la lecture était devenue un refuge simple et tranquille. Personne ne venait le déranger ici, en plus, en règle générale, ce qui n’était pas pour lui déplaire… Pourtant, ce soir-là, quand il voit son frère débarquer dans la pièce comme une furie, il a le réflexe de se lever de son siège, lui lançant un regard affolé. Il a bien vu cette lueur dans ses yeux, une lueur fâchée qui ne présage rien de bon. Evan ne le fait d’ailleurs pas mentir sur son appréhension plus que justifiée quand il l’attrape par le col, le plaquant contre le mur le plus proche. Il gronde, petit serpent en colère, comme il grimace, le dévisageant sans comprendre ; qu’est-ce qu’il avait à lui reprocher encore ? Il s’était tenu à carreaux depuis Alfie et leur altercation au Chaudron Baveur. Il s’était conformé à ses conseils et à ses exigences, n’était-ce donc pas assez ? “ est-ce que tu as perdu tout forme de dignité et t'es donc résigné à récolter mes miettes ? Si c'est le cas, je suis très déçu, Luke. ” C’est comme une gifle, c’est presque pire que ça… Il reçoit l’accusation comme un camouflet, le pire étant qu’il ne la comprend pas le moins du monde. « Mais… » qu’il commence à protester, sans qu’Evan ne lui en laisse la moindre chance, resserrant sa prise sur son col et lui tirant un sifflement contrarié. “ Qu'as-tu fait avec les Fawley ? ” Il glisse ses doigts autour du poignet de son aîné, serrant à son tour dans le but de le faire lâcher prise. « RIEN DU TOUT ! » Il s’indigne le plus jeune, le fusillant du regard. « J’ai pas eu mon mot à dire, qu’est-ce que tu crois ? » Il grimace car la poigne du mangemort est un brin douloureuse, gênant sa respiration. « Et t’as pas ton mot à dire non plus ! Si tu voulais tellement la garder, fallait pas te la faire dans le lit des parents ! » Fallait-il être stupide pour faire une chose pareille, sérieusement… « Tu me fais mal… » Un simple avertissement…

L'été ou une longue succession de journées chiantes à mourir à passer dans ma chambre à lire ou à emmerder Luke. M'occupant comme je pouvais, je rêvais de ce moment béni où je me retrouverai de nouveau à Poudlard, entouré par mon cercle d'amis à fomenter quelques manipulations de mon crû. Car au Manoir Rosier, la tension était palpable, vive, au point que même des invités de passage pouvaient la ressentir. La faute à toutes ces histoires de fiançailles. La faute au scandale provoqué par Evan. Si je n'avais pas mon mot à dire sur tout cela, je n'en perdais pas une miette, à l'image d'un journaliste avide d'informations croustillantes. Fasciné par des rebondissements qui me paraissaient tellement en décalage avec ce que je pouvais vivre à mon niveau. Oh je n'étais pas dupe, viendrait surement ce jour fatidique où l'on m'annoncera le nom de l'heureuse gagnante du lot de consolation, le petit dernier des Rosier. Cette simple idée me donnait la nausée, presque autant que de devoir me faire attentionné à son égard... Il fallait dire aussi que je jouais énormément sur mon statut d'intouchable; que j'entretenais cette idée que pour m'avoir, il fallait y mettre les moyens. Au final, j'étais bien tranquille de cette manière et je m'amusais de voir mes frères se perdre dans leurs petits problèmes matrimoniaux. Alors, oui, lors de ce fameux dîner où les parents annoncèrent les fiançailles de Luke et Dalia, l'ancienne fiancée d'Evan, je ne pus empêcher un sourire narquois de s'afficher sur mes lèvres. Parce que cette situation était risible, irréelle. Je plaignais sincèrement mon cadet, mais son expression m'amusait férocement. Comme si le destin me vengeait. Bien entendu, j'évitais d'en rajouter une couche, restant silencieux et évitant soigneusement de croiser le regard d'Evan pour ne pas qu'il voit à quel point tout cela me faisait jubiler. Puis il se leva, énervé, et partit sans demander son reste. Je ne comprenais pas pourquoi il avait réagi de cette façon. Ne devrait-il pas être en train de rire avec moi? Cette attitude me dépassait, comme tout ce qui était en jeu derrière. Peu perturbé par cette histoire, je finissais mon assiette, au contraire de Luke, avant de rejoindre ma chambre. Refuge.

Plus tard dans la soirée, mes pas me guidèrent vers la bibliothèque, afin d'y remettre un ouvrage et d'en emprunter d'autres, histoire d'occuper ma nuit. Ce ne fut qu'à l'approche de la pièce que j'entendis des éclats de voix à l'intérieur. Typique. Je tiquais en reconnaissant les voix de mes frères, qui, une fois n'était pas coutume- semblaient sur le point de s'étriper. Un soupir s'échappa d'entre mes lippes, alors que mes doigts passèrent dans mes cheveux dans un geste nerveux. Devrais-je les laisser tranquilles? Il était presque sûr qu'ils m'en voudraient d'intervenir. Et je ne comptais plus le nombre de fois où je m'étais pris un retour de flamme dans ce genre de situation. Mais... c'était plus fort que moi. J'avais un besoin viscéral de m'en mêler, juste pour montrer que j'existais en quelque sorte. Mon caractère me poussait à la prudence, toutefois ma curiosité m'incitait à l'inverse. Le coeur battant la chamade, je rentrais alors dans la pièce en faisant ostensiblement du bruit pour attirer leur attention. Ugh. C'était pire que ce que je pensais, au vu de la manière dont Evan tenait Luke. Pourquoi donc étaient-ils encore en train de se battre? Belle soirée en perspective. Les subtilités de leur relation m'échappaient souvent. Peut-être bien parce que j'avais passé moins de temps avec notre aîné et que nous ne nous connaissions pas si bien que ça. Mon regard se perdit sur leurs visages qui traduisaient la surprise de me voir. Haussant les épaules d'un air presque détaché et peu intéressé, je lâchais soudainement: "J'viens juste ramener un livre, faites pas attention à moi." Est-ce que je devrais dire quelque chose en faveur de Luke? Histoire qu'Evan le lâche un peu?... Non. Je n'en avais pas envie ce soir. Il n'avait qu'à pas se démerder pour se le mettre à dos constamment. Au fond, je pourrais simplement prendre mon bouquin et m'éclipser, pourtant il fallait que j'en rajoute, que je mette mon grain de sel. "Sinon, il reste du dessert en cuisine si vous voulez, si jamais l'envie vous prend..." Si cette remarque partait d'une bonne intention -après tout, ils n'avaient ni l'un ni l'autre eu l'envie de finir le repas-, elle pouvait tout aussi bien être prise comme une provocation de ma part. J'en étais bien conscient. D'autant que mon mince sourire en coin avait tendance à approuver le coup de la provoque. Restait que je ne me rendais pas bien compte de l'impact de la révélation de la soirée, ni de ce que cela impliquait pour les sentiments de mes deux frères. Comme toujours, je ne les comprenais pas...

Evan ne sait pas d'où vient cette rage, mais il ne l'apprécie pas du tout. C'est nouveau, normalement il aime bien, se sentir énervé, c'est la seule chose qui le fait se sentir en vie. Cette fois ça le fait se sentir pathétique et stupide, et il n'aime pas ça, alors il décide de se focaliser sur une seule chose: la face d'insecte de Luke et les petits tremblements qu'il sent de son corps. « RIEN DU TOUT ! » Evan grogne en réponse, ça ne va pas suffire cette fois. Il serre un peu plus le col de Luke, ses poings appuyés contre sa gorge, ignorant les doigts de Luke qui se pressent sur ses poignets. Il repense à Dalia et à Alfie et ça le tue, ça le torture véritablement de l'intérieur. Décidément, son frère qu'il adore et déteste en mesures égales, n'arrive à rien faire correctement. Peut-être qu'il est plus malade qu'il ne le pensait au départ. « J’ai pas eu mon mot à dire, qu’est-ce que tu crois ? » Evan pince des lèvres, il peut bien l'imaginer, mais n'a-t-il donc aucune fierté?  « Et t’as pas ton mot à dire non plus ! Si tu voulais tellement la garder, fallait pas te la faire dans le lit des parents ! » Les yeux d'Evan s'assombrissent et il resserre un peu son emprise. Il ne voulait pas la garder, il s'en fiche complètement d'elle, comment ose-t-il dire ça, il s'en fiche de Dalia. « Tu me fais mal… » En réponse, Evan resserre un peu son emprise avant de la relaxer un peu, ne voulant pas trop torturer son frère.

Son emprise se relâche tout à fait quand la porte de la bibliothèque s'ouvrit, le visage d'Evan se tournant immédiatement vers le battant en pensant y trouver leur père. Il garde ses mains sur le col de Luke, ceci dit, il ne le lâche pas quand bien même il arrête d'essayer de l'étouffer lentement. Mais ce n'est pas Rosier sr, simplement Audran. "J'viens juste ramener un livre, faites pas attention à moi." Toujours fouille-merde, celui-là, pense Evan en sifflant légèrement, comme pour lui indiquer de les laisser seuls. Lui et Audran n'ont jamais été proches, ils partagent peu de choses, Evan a l'impression d'être fait d'explosions, de lave et de flammes là où Audra n'est qu'un bout de bois gelé qui ne réagit à rien. C'est peut-être exagéré mais il a toujours eu du mal à comprendre et lire son frère benjamin. "Sinon, il reste du dessert en cuisine si vous voulez, si jamais l'envie vous prend..." Evan grogne de nouveau en relâchant définitivement Luke, ses mains se plaquant brièvement sur son torse pour le repousser en arrière contre le mur, un peu brutalement. “ Je m'en fous d'elle, ” dit-il très simplement, les sourcils froncés, l'air de quelqu'un qui va vous sauter à la gorge si vous osez lui dire qu'il n'est pas très convaincant. “ J'ai juste pitié pour toi, toute ta vie tu n'auras que ce dont je ne veux pas. Tu penseras à ça, quand tu la baiseras, que je l'ai fait avant toi? ” Evan a une petite moue en secouant la tête et puis reprend, presque fraternel, limite gentil: “ Ça me rend triste, je m'inquiète pour toi, Luke. ” Il s'inquiète pour lui depuis Pré-au-Lard, le Chaudron Baveur, Alfie. Il serait grand temps qu'il fasse quelque chose à propos de ça d'ailleurs.

Evan détourne le regard pour regarder Audran, son visage indéchiffrable. “ C'est quoi, le dessert? ” demande-t-il d'un ton ennuyé, comme si rien ne s'était passé qui ne sortait pas de l'ordinaire, complètement relaxé et ennuyé à la fois... et sincère. Les desserts sont ses plats préférés de n'importe quel dîner.

Spoiler:

Il a bien du mal à comprendre Evan, cette fois. La plupart du temps, malgré leur différence, il savait faire preuve de suffisamment de psychologie et de compréhension pour réussir à gratter sur la surface et saisir la motivation de ses gestes. Il ne lui en avait pas vraiment voulu pour Alfie car il comprenait son envie de le protéger. Là, il ne voyait tout simplement pas, malgré tous ses efforts. S’il s’imaginait que Luke était ravi de ce retournement de situation, il était plus idiot qu’il ne l’aurait jamais cru. Il tente de le prévenir qu’il lui fait mal, premier avertissement avant qu’il ne se décide à rendre les coups et que tout ça finisse en pugilat. Si Evan finit par desserrer sa prise sur sa gorge, à son plus grand soulagement, cette satisfaction n’est que de courte durée quand il voit le visage de son plus jeune frère apparaitre dans l’encadrement de la porte. Décidément, cette soirée allait de Charybde en Scylla… « J'viens juste ramener un livre, faites pas attention à moi. » Le cadet le crucifie du regard. Entre Hippolyte et lui, ça avait été compliqué, ces dernières semaines… Le benjamin s’était permis des mots durs à propos de sa relation avec Alfie, des mots qu’il avait, étrangement, moins bien digéré que les coups et les reproches d’Evan. Et bien sûr, ce sourire en coin qui provoque à outrance, il crève d’envie de le lui faire ravaler sur le champ. « Sinon, il reste du dessert en cuisine si vous voulez, si jamais l'envie vous prend... » Sérieusement ? Evan consent tout de même à le relâcher, quand bien même il le repousse un peu brusquement contre le mur. Il grogne, comme un chien en colère, le cadet, mais il ne dit rien, se contentant de ruminer en silence. “ Je m'en fous d'elle, ” Peut-être que c’était vrai. Peut-être que non et qu’au fond, là était tout le problème. Luke ne savait pas trop quoi en penser mais le regard de son aîné le dissuade de poser la question et d’émettre l’hypothèse qu’il ment. “ J'ai juste pitié pour toi, toute ta vie tu n'auras que ce dont je ne veux pas. Tu penseras à ça, quand tu la baiseras, que je l'ai fait avant toi ? ” Il serre les dents, le Serpentard, à défaut de serrer les poings pour lui en coller une. Il signerait un arrêté pour une bonne raclée, il le savait, et il n’était pas franchement disposé à se prendre une branlée devant Audran… Connards… Au pluriel, c’était important… “ Ça me rend triste, je m'inquiète pour toi, Luke. ” Il esquisse une moue ennuyée, pas franchement convaincue, soupirant lourdement. “ C'est quoi, le dessert ? ” Son air nonchalant achève de mettre à vif les nerfs du cadet, quand il le voit discuter de desserts comme s’il ne venait pas de le bousculer pour quelque chose dont il n’était pas responsable. « Tu ne t’inquiètes que pour toi, Evan… » C’était un brin injuste et il n’en était même pas persuadé, sachant bien que, malgré ses mauvais côtés, son aîné avait toujours cherché à le protéger. Plus ou moins. Pour autant, la colère embrouille ses pensées et il n’est pas d’humeur magnanime. « J’y penserai pas quand je serai avec elle… » qu’il commence, se fendant de ce sourire narquois dont il avait le secret et qui lui avait valu bien des ennuis, à Poudlard. « …et elle n’y pensera pas non plus… » Il laisse échapper un ricanement moqueur, avançant de quelques pas, juste assez pour se rapprocher d’Hippolyte en balançant un coup d’épaules à Evan au passage. « Je ne sais pas pour toi mais, les filles, quand elles sont dans mon lit, elles n'ont pas le temps de penser à leurs exs… » Coup bas, certes. Il n’en avait rien à foutre. Aux dernières nouvelles, aucun de ses frères ne lui faisait de cadeau alors pourquoi les épargnerait-il, lui ? En pensant à ça, il attrape le bouquin des mains du plus jeune, ses prunelles claires parcourant brièvement le titre avant de le jeter dans un coin de la pièce, sans user de la moindre précaution. Contrairement à Audran, il n’avait jamais aimé les livres. « T’as un truc à ajouter, Audran ? Il semblerait que ce soit ma soirée, fais toi plaisir… » Tout dans son regard indiquait pourtant qu’il n’avait plutôt pas intérêt à l’ouvrir au contraire, s’il ne voulait pas se prendre le retour de manivelle de sa colère pourtant dirigée vers Evan…

Dire que je ne prenais pas plaisir à me mêler des affaires de mes frères serait un mensonge. Les regards qu'ils posèrent sur moi à mon entrée dans la pièce suffirent à faire bouillonner mon sang, provoquant en moi un plaisir immense, qui pourtant ne prit forme sur mon visage qu'à travers un mince sourire en coin. De toute manière, je n'étais pas du genre très expressif. Mes émotions, je les gardais pour moi, quitte à paraître insensible ou froid. Voir les autres se démener pour me comprendre m'amusait beaucoup... Y compris Evan. Peut-être aurais-je du faire l'effort d'apprendre à le connaître mieux, histoire d'être capable d'analyser ses réactions. Mais honnêtement, je n'en avais pas eu envie. C'est malgré moi que mon frère aîné relâchait Luke, ce qui m'arracha presque une moue ennuyée. J'aurais bien aimé qu'il s'en prenne plein la gueule et m'en délecter. Bien entendu, mon frère cadet me lâcha l'un de ses regards assassins que je connaissais si bien. Il fallait dire que nous nous étions soigneusement évités ces derniers temps. Depuis notre dernière altercation, un gouffre s'était ouvert entre nous. Un gouffre fait de ressentiments, d'incompréhensions. Alors que je m'apprêtais à ranger mon livre, j'écoutais d'une oreille distraite ce que disait Evan, et je me stoppais en l'entendant parler à Luke. “ J'ai juste pitié pour toi, toute ta vie tu n'auras que ce dont je ne veux pas. Tu penseras à ça, quand tu la baiseras, que je l'ai fait avant toi ? ” Il m'arracha un sourire narquois. J'en aurais presque ri si je n'avais pas eu un brin d'esprit de conservation. Il était hors de question que je me retrouve coincé entre mes deux frères. De toute façon, et même si je ne l'avouerais jamais, je ne faisais le poids devant aucun d'entre eux. Je m'attendais presque à ce que Luke riposte, mais bizarrement, il resta silencieux. “ Ça me rend triste, je m'inquiète pour toi, Luke. ” Mes pupilles claires glissèrent sur mes deux frères, arrêté dans mon élan par cet échange croustillant. “ C'est quoi, le dessert ? ” Ah, Evan s'adressait à moi? Perturbé de l'entendre me poser cette question comme si la situation était tout à fait normale, j'ouvrais la bouche avant de la refermer soudainement. Puis, au moment où je m'apprêtais à lui répondre, Luke me coupa la parole et je lui servis un regard noir. « Tu ne t’inquiètes que pour toi, Evan… » Rongeant mon frein, je le laissais déverser son fiel sur Evan, au risque d'éveiller la colère de notre frère aîné. Cet idiot chercherait donc à s'en prendre une? Il était encore plus inconscient que ce que je pensais. Je soupirais un peu trop bruyamment. « J’y penserai pas quand je serai avec elle …et elle n’y pensera pas non plus… » Le sourire de Luke ne présageait rien de bon, tout comme ce ricanement qui n'allait surement pas laisser Evan indifférent. Alors qu'il se rapprochait de moi en bousculant notre frère, je sentais une alerte silencieuse familière s'allumait en moi... Pas trop près, Luke. « Je ne sais pas pour toi mais, les filles, quand elles sont dans mon lit, elles n'ont pas le temps de penser à leurs exs… » Ah. Luke voulait donc vraiment attaquer Evan. Faisant mine de me désintéresser de cette conversation qui en réalité me gênait plus que je n'oserais le dire, je reportais mon regard sur la couverture du livre que je tenais afin de vérifier le titre et de savoir où le ranger. Puis, le livre disparut de mes mains pour atterrir dans celles de Luke, et j'esquissais un geste vers lui pour le récupérer. "Hey, rends-le moi!" lachais-je avec agacement, avant de voir ce pauvre livre se retrouver de l'autre côté de la pièce. Nulle doute que si jamais notre père savait comment Luke traitait les livres de la bibliothèque des Rosier, il se prendrait une raclée bien méritée. Qu'est-ce qu'il avait l'idiot? Je plongeais ostensiblement mon regard noir dans celui de mon frère cadet. Pas de retenue. Entre frères, on ne se faisait pas de cadeau. Parce que c'était ainsi qu'on fonctionnait... « T’as un truc à ajouter, Audran ? Il semblerait que ce soit ma soirée, fais toi plaisir… » Je tiquais légèrement, levant les yeux au ciel en entendant mon deuxième prénom prononcé avec tant d'amour. Il le faisait exprès bien sûr. Il voulait que je m'énerve, me pousser à lui répondre pour qu'il ait une bonne raison de s'en prendre à moi. Reprenant contenance avec difficulté, je finis par afficher un sourire moqueur et un brin provocateur. Il voulait jouer? Allons-y jusqu'au bout alors. Faire une petite entorse à ma règle n°1: rester prudent. "Je n'ai rien d'autre à dire à part qu'il n'y a que les idiots et les lâches pour s'en prendre aux livres au lieu d'affronter leurs problèmes..." Sans avoir la portée réelle de ce qui s'était dit entre mes frères, je ne pouvais que me douter que j'allais attiser la colère de mon frère. Pourtant, loin d'avoir peur, je ressentais presque de l'allégresse. Comme si le fait que nous étions réunis ici tous les trois, me poussait à exister face à eux. Rester que les conséquences pouvaient être désastreuses... Ignorant ostensiblement Luke, je posais mon regard à nouveau sur Evan. "Et pour répondre à ta question, c'était un excellent cheesecake." Je ne savais pas si cela l'intéressait réellement ou s'il voulait juste faire la conversation. Mais après tout, il n'y avait pas eu de colère dans sa voix lorsqu'il me l'avait demandé...