[flash-back] orange is the new black | ted

L'été a été long pour Andromeda. Les choses auraient pu être pires, étant donné l'issue catastrophique de l'année précédente, mais la jeune femme a sauvé les meubles, en se faisant discrète et en étudiant dans son coin pour passer le temps. Pour ce qui est de ses sœurs, sa rupture avec Ted, a simplement évité que le scandale ne s'étende à la maison familiale, sans pour autant arranger les choses avec Narcissa et Bella. Au fond d'elle, Andromeda ne se sent déjà plus à sa place au sein de la maison Black, et le manque qui agite son cœur d'adolescente, ne rend les choses que plus difficiles à vivre encore. L'année qui s'est écoulée a profondément changé les choses, et malgré l'envie séduisante de rentrer dans les rangs à grand renfort de déni, dès que la brune ferme les yeux, elle repense à tous les instants volés qui ont rythmé son année, tandis qu'un petit air de Pink Floyd s'invite dans sa tête bien malgré elle.

Aussi lorsque la date du retour à Poudlard approche à grand pas, il lui devient de plus en plus difficile de détourner son esprit du visage souriant de son ancien amant et ami. C'est d'ailleurs anxieuse qu'elle aborde le premier jour de la rentrée, sans Bellatrix. Traînant sa valise, elle salue respectueusement ses parents, avant de s'engouffrer dans le train, laissant Narcissa seule dans un wagon pour la première fois depuis six ans. Choix qui fera jaser sans doute, mais qui signe l'indépendance d'une dernière année qu'elle veut vivre comme elle l'entend. Andromeda s'installe donc seule, détache ses cheveux et sort de quoi retoucher son maquillage selon ses propres goûts, comme pour rompre avec l'image de petite fille Black parfaite qu'elle n'est plus, de toute évidence. Elle a essayé tout l'été, pour pas tellement de résultat finalement.

À l’aube de ma septième année à Poudlard, je suis plus stressé que jamais je ne l’ai été. Étrangement – ou pas -, ce ne sont pas les ASPICS qui me flippent plus que de raison, mais bien l’idée de recommencer à croiser Andromeda dans les couloirs de l’école et en cours. Deux mois ne m’ont pas suffi pour me remettre de cette rupture que j’ai pourtant acceptée comment étant « le mieux à faire ». J’aurais aimé pouvoir en parler à quelqu’un, n’importe qui dont l’avis ne serait pas aussi tranché que celui de mes parents qui ne comprennent pas – à juste titre – où se trouve le problème dans le fait qu’ils soient moldus puisque c’est de moi dont on parle, ni que celui de tous ces sang-pur qui refusent catégoriquement toute discussion à propos de la « mixité » du sang. Si ton sang n’est pas pur, tu ne te reproduis pas avec quelqu’un qui l’est, point final.

Comprenez donc que j’ai eu beaucoup de mal à digérer. La situation est injuste et je n’ai pas eu l’occasion d’en parler à quelqu’un dont l’avis est plus nuancé durant l’été. Ma mère s’était contentée de me dire que la famille Black était « raciste et dangereuse » - j’avais effectivement passé quelques jours à l’infirmerie de Poudlard en fin de sixième année lorsque Bellatrix avait découvert que je sortais avec sa petite sœur – et que si Andie semblait « relativement correcte », il ne s’agissait pas d’une grande perte. « Tu n’as que dix-sept ans », m’avaient-ils dit. À croire qu’ils avaient tous oublié à quoi ressemblait leur premier chagrin d’amour. Résultat des courses : c’est avec la boule au ventre que je salue mes parents pour entrer dans le Poudlard Express, traînant ma grosse valise derrière moi.

Je suis l’un des derniers à entrer avant que les portes ne se ferment lourdement et il n’y a déjà plus de place dans le train… Ah, si : un compartiment reste désespérément vide et j’en ouvre la porte avec satisfaction. Je n’ai évidemment pas vu la seule personne assise à l’intérieur. Je sursaute lorsque j’aperçois Andromeda. Si vite… Mon cœur rate un battement et je fais mine de faire demi-tour :

- Désolé, je n’avais pas vu que… je vais attendre dans le couloir, pardon.

Deux excuses en une seule phrase – triste. Je me retourne, posant la main sur la poignée de la porte, et commence à l’ouvrir à contrecoeur. Andromeda a changé en deux mois. Le maquillage, probablement. Elle a probablement dû réussir à passer à autre chose, elle, avec une famille lui rabâchant à longueur de journées à quel point je suis de mauvaise influence.

Comme par un fait exprès, le wagon ne reste pas vide bien longtemps. Et au lieu de voir apparaître quelques élèves de sa maison bien décidé à la snober eux aussi, c'est une tête finalement bien connue qui apparaît derrière la porte. Lorsque la jeune fille lève les yeux pour l'identifier, c'est son cœur qui loupe un battement. Évidemment qu'elle allait le recroiser, elle n'avait juste pas pensé que ça puisse arriver aussi rapidement. Alors gênée, elle déplace ses affaires pour lui faire de la place à côté d'elle, malgré les sièges vides qu'il aurait été tout à fait possible d'occuper en face pour imposer une distance plus raisonnable, en admettant qu'ils en aient eu l'envie. Mais quitte à être tout seuls dans ce wagon, Andromeda recherche inconsciemment une certaine forme de proximité avec ce garçon qu'elle a pourtant lâchement abandonné en fin d'année. Elle sait qu'inviter Ted Tonks à rester ici, après avoir laissé Narcissa seule avec ses amies aura des répercussions, mais pour la première fois de sa vie, Andromeda est presque prête à les assumer. Les choses ne vont pas s'améliorer à la maison, tout comme elle doute d'être capable de mettre ses sentiments pour Ted de côté à terme. Si elle n'avait pas aussi peur d'exprimer ses sentiments, elle lui sauterait sans doute au cou pour lui dire qu'elle regrette et que les mois passé loin de l'école lui ont permis de réfléchir à la situation. Mais Andromeda, aussi Black qu'elle est, ne saurait être aussi expansive. « Sois pas stupide Tonks, tu vas gêner tout le monde en restant dans le passage. Il y a plein de place ici. ». Nouveau regard vers le blond, Andromeda lâche un soupir triste qui en dit long sur l'avancée quasi inexistante du deuil de leur relation. « Ca ne me dérange pas que tu restes. » Loin de là, et c'est bien tout le problème. Les quelques mois qui se sont écoulés, ne l'ont pas rendu moins beau qu'il ne l'était quand elle a dû mettre un terme à leur relation. « On va continuer de se croiser tous les jours de toute façon. »

La main sur la poignée de la porte, je ferme les yeux, tiraillé entre mon envie de rester et celle de prendre mes jambes à mon cou. Elle a raison, cependant : on va être amenés à nous croiser plus que de raison, cette année, et il va vraiment falloir que je commence à me faire au fait d’être dans la même pièce qu’elle sans pouvoir la toucher. Je soupire, poussant ma valise vers le fond du compartiment et m’installe à côté d’elle puisqu’elle m’a fait une place. Je ne suis pas persuadé que ce soit une bonne idée, la voir si proche me brise le cœur et je comprends que mon deuil n’a même pas commencé et la plaie est aussi ouverte que le premier jour.

- Ouais, j’imagine, je soupire en évitant soigneusement son regard.

Je me tais et un long silence gêné s’installe. J’ai l’impression qu’il dure des heures, ce silence, et je garde les deux mains coincées entre mes deux cuisses comme si j’avais peur qu’elles ne l’effleurent par accident si je les laisse en liberté. Nouveau soupir.

- Pas la peine d’imaginer qu’on puisse rester amis, je suppose ? La question est débile et je la regrette instantanément. Alors, je bafouille pour me justifier : Parce que… tu sais, toi et moi… on s’entendait bien, non ? Avant... tout ça ?

Andromeda est nerveuse, une sensation étrangement familière en présence du blond. Alors qu'il hésite à partir tout de même, l'abandonnant là toute seule dans ce wagon, il finit par capituler et venir s'asseoir près d'elle. Si son départ lui aurait brisé le cœur, le fait qu'il décide de rester n'est pas aussi facile à gérer qu'elle ne l'aurait pensé. La distance aussi bien polie que gênante qui les sépare, ne suffit pas à normaliser la situation, et encore moins à éradiquer les petits papillons qui s'agitent au creux de son estomac, se mêlant assez joyeusement au beau bordel de son rythme cardiaque. Foutu Ted Tonks. Andromeda lui jette un regard en coin, frustrée par cette distance qu'elle a elle même imposée à la fin de l'été. Maintenant qu'ils vont devoir se supporter tous les jours, la décision est inévitablement beaucoup plus difficile à assumer. Bellatrix n'est plus à l'école, et Narcissa peut cafter tant qu'elle le veut, Ted ne risque plus de se retrouver à l'infirmerie pour un sort perdu. « Je sais. », répond t-elle plus froidement qu'elle ne l'aurait voulu, sous le coup de la frustration. « Mais je suis sûre, que tu t'es déjà fait plein d'autres amies, dont les sœurs ne cherchent pas à t'envoyer à l'infirmerie à la moindre occasion. » Nul doute, qu'il ne prendra pas bien longtemps à la remplacer d'ailleurs, adressant ses petits clin d’œil complice, à une petite poufsouffle sans histoire qui complimentera ses cheveux balayés par le vent après un entraînement de Quidditch. L'idée lui fait mal au cœur, mais c'est vraisemblablement ce qu'il se passera ensuite. Andromeda jette un nouveau regard en coin à Ted. Elle aimerait lui faire un vague compliment, dire quelque chose de gentil pour lancer la conversation, mais rien ne lui vient à l'esprit. Tout ce qu'elle aimerait lui dire, il est beaucoup plus judicieux de le garder pour elle.

Je mets les pieds dans le plat parce que ça me tracasse, parce que je rêve secrètement – ou pas tant que ça – de la prendre dans mes bras et de lui demander d’arrêter les conneries. Pourtant, je n’en fais rien, gardant bien mes deux mains coincées entre mes cuisses pour être certain de ne même pas l’effleurer, comme si c’était le délit du siècle. Ma plaie est encore ouverte, et si je suis gêné d’être en la présence d’Andie, quelque chose en moi est heureux de ce hasard qui, pourtant, finira par me torturer à tourner et retourner dans ma tête à grands coups de « j’aurais dû ».

Andromeda est amère et je secoue la tête, incapable d’être moins sincère et plus réservé :

- Tu sais que c’est faux.

Je crache mon dégoût. Comment peut-elle penser que je viens de passer deux beaux mois à sortir avec toutes les filles de mon quartier ? J’étais en pls dans mon lit à ressasser mes souvenirs, pour la plupart du temps, avec ma mère en fond sonore me rappelant qu’ « à ton âge, on ne pleure pas pour une fille, enfin ! ».

- J’étais prêt à faire avec tes sœurs, mais je ne doute pas que ça doit être bien plus simple de se faire des amis plus… conventionnels qu’un sang-de-bourbe, je comprends ça, t'en fais pas.

La bombe n’est pas délicate et le sujet sensible revient sur le tapis. J’ai passé les deux derniers mois à alterner entre envies de me battre pour me faire valoir au-delà de mon sang et regrets de ne pas être juste moldu, autant vous dire que ça avait besoin de sortir.

Andromeda ne sait pas comment se sentir. Tout l'étouffe, sa famille, la tristesse de Ted... Elle a surtout l'impression de ne rien contrôler, et le sentiment ne fait que se renforcer avec le temps. Tout serait évidemment plus simple, si elle n'avait jamais laissé son cœur s'enticher de Ted Tonks. Mais avec des si on pourrait refaire le monde, et de toute évidence, l'été passé auprès de sa famille le lui a bien prouvé : on ne peut pas retourner en arrière, et fermer les yeux sur ce qu'on a eu le malheur de réaliser par soi-même. La guerre qui s'annonce les dépasse tous les deux, mais Ted Tonks ou non, Andromeda ne rentre plus dans le moule de la petite sang-pur idiote qui répare les erreurs des Bellatrix, et se fiche du sort des né-moldus comme son ami, ou ex petit ami. Le fait qu'elle se soit assise toute seule dans ce wagon l'illustre parfaitement, elle n'a plus sa place avec les Black. « Rien n'est simple, Tonks. » Andromeda réplique acide. Elle ne veut pas se montrer si désagréable, consciente qu'une bonne partie de leurs malheurs est de sa faute, mais il est bien difficile pour elle d'avoir une conversation à cœur ouvert avec Tonks, elle a qui on a toujours appris à garder ses sentiments pour elle. « Tu ne comprends pas, et c'est normal , je ne te le demande pas d'ailleurs. J'ai changé, j'arriverai pas à faire semblant d'être comme eux, même si je le voulais. Et à la fin de l'année, j'aurais nul part où aller, parce que je ne serais plus une Black pour eux. » Elle hausse une épaule, joue avec un paquet de bonbons qu'elle a acheté un peu plus tôt. C'est une évidence, son choix de ne pas s'asseoir avec Narcissa aura des répercussions. « Je les déteste comme toi, les amis conventionnels. Je déteste tous les gens qui te veulent du mal...» Elle ajoute à peine audible.

Je sais qu’elle va à l’encontre des pensées archaïques de sa famille, que ça ne vient pas d’elle et que notre rupture servait surtout à me « protéger » de nouvelles attaques qui auraient probablement pu être plus violentes que celle que j’avais subie en juin dernier. Je n’ai pas été enchanté de passer plusieurs jours à l’infirmerie après avoir été agressé par Bellatrix Black, mais mon court séjour avec l’infirmière s’était tout de même retrouvé plus agréable que les deux mois de pseudo-vacances dont j’étais aujourd’hui délivré. Et j’en serais encore plus soulagé si les choses pouvaient redevenir comme avant.

Non, les choses ne sont pas si simples, mais elles pourraient l’être si Andromeda décidait de débrancher son cerveau et de le poser sur son siège pour quelques minutes. Peut-être que c’est  égoïste et il n’y a aucun doute que c’est le Ted aux débuts d’idées anarchistes qui parle, le Ted qui a passé deux mois à écouter Alice Cooper et tous ces artistes protopunks qui te donnent des ailes et te laissent croire que t’as tout à fait le droit de renier ta famille et te barrer sans que ça ait de conséquences. Mais c’est comme ça. J’ai envie de lui dire de laisser tomber ces tarés et de venir avec moi. On pourrait faire ça. On pourrait s’enfuir loin des Black et faire notre vie tranquille, voyager dans le monde entier, et en rire dans dix ans.

Mais ce n’est pas comme ça que ça marche. Et mes idées révolutionnaires, je finis par me les garder, osant simplement un timide :

- On aurait pu s’enfuir ensemble. Mais je comprends, t’en fais pas, je comprends.

Long soupir désespéré. Je décide de dire un truc, n’importe quoi qui pourrait faire oublier la proposition ridicule que je viens de lui faire :

- Jolie transformation, Black. Ça te va bien.

Maladroit. Encore et toujours. J’aurais mieux fait d’attendre dans le couloir, tout compte fait.

Adromeda ne put s'empêcher de laisser s'échapper un petit rire cynique lorsqu'il lui annonça qu'ils auraient pu s'enfuir ensemble, et pourtant à l'époque Andromeda ne savait même pas que ce serait précisément ce qu'ils feraient tous les deux à la fin de l'année, il n'y avait donc pas vraiment matière à s’esclaffer en toute honnêteté. Tonks la faisait rire en réalité, et dans les pires moments la plupart du temps. Et pour le coup, ce n'était très probablement pas son intention première. Il le pensait, et c'était ce qui le rendait si honnête et naïf à cet instant précis, mais aussi terriblement attachant. Le fait qu'il fasse passer le tout avec un compliment n'arrangeait pas les choses pour autant. Andromeda avait beau se détester pour cette réaction, elle finissait toujours par sentir son cœur s'emballer quand le jeune Tonks se prêtait au jeu des compliments. Malheureusement pour eux, l'été n'avait absolument rien changé à la théorie des contraires. « J'avais envie de changement. » commenta t-elle en haussant les épaules, pourtant bien consciente que son envie de changement ne s'arrêterait pas à un simple trait d'eye liner en plus. Ted Tonks avait beau porter son uniforme, Andromeda n'avait pas eu de mal à l'imaginer vêtu d'un t-shirt Pink Floyd ou d'une petite veste en cuir pendant l'été. « Ça fait du bien de te voir en tout cas, Tonks. Jolie coupe de cheveux, ça te donne l'air un peu plus....» ajouta t-elle finalement beaucoup trop sincère pour faire passer cette révélation pour une banalité. Il lui avait manqué, et les regards de côté qu'elle continuait de lui jeter à lui et à sa crinière dorée ne faisaient que confirmer cette hypothèse. « Vieux, but in a good way. » Andromeda n'était jamais très à l'aise sur ce terrain là. Passer des années à ne jamais s'autoriser à dire ce qu'elle pensait avait forcément laissé quelques traces.

Andromeda avait toujours réussi à me couper le souffle et ce depuis l’instant même où on avait fini par bosser ensemble sur ce projet ridicule qui nous avait permis de nous rapprocher. Le fait qu’elle soit à nouveau inaccessible ne m’aide actuellement pas à contrôler la vague d’émotions contradictoires qui me prend. Jamais douée quand il s’agit de s’ouvrir, je prends sa réflexion maladroite comme un compliment qui me rend le sourire pour quelques secondes ou quelques minutes - jusqu’à ce qu’un autre élément vienne me l’arracher comme il est apparu, brusquement.

- Merci. Toi aussi, ça te donne l’air plus… mature. C’est bien.

Ou pas, mais ça lui donne en tout cas un petit côté rock’n’roll que j’apprécie particulièrement, laissant de côté la jeune fille sage que j’avais laissée au mois de juin. C’est ce que j’entends par « mature », évidemment. Pas sûr que ce soit la même définition que celle de ma grand-mère, en toute honnêteté, mais elle me convient bien.

Les coups d’œil en coin ont raison de moi et je finis par me tourner vers Andie pour de bon, m’autorisant à la regarder, à relâcher un peu de ma retenue, me passant même une main dans les cheveux pour la forme.

- Ca se passe pas franchement mieux chez toi, alors ?

Je mets les pieds dans le plat. Tout ça m’intéresse et le fait qu’elle se soit séparée de Narcissa pour le trajet, chose qu’elle n’a jamais faite avant, et sa réflexion sur le fait qu’elle n’ait nulle part où aller en juin suffit à m’en donner confirmation.

- Parce que, si ça se passe pas mieux et que ça peut t’aider, on peut essayer de mettre un truc en place. Genre toi me mettant la raclée du siècle au milieu du parc du château, ça devrait suffire à fermer quelques clapets, non ?

Ou à en ouvrir quelques-uns. « Tu dis de la merde, Tonks », voilà ce qu’elle va me dire. Mais qui pourrait m’en blâmer lorsque tout ce que je veux c’est quelques excuses pour passer du temps en sa compagnie ?

Ted lui retourne le compliment, et si sa formulation dudit compliment est aussi vaseuse que la sienne, ils se comprennent sans avoir besoin de s'en s'excuser. Andromeda est de toute façon bien trop occupée à le regarder pour laisser son esprit s'arrêter sur quelques mots maladroits venant de sa part. Ted Tonks la trouve jolie, et c'est bien tout ce qui l'intéresse finalement. L'été a été long, très long, mais n'a pas changé grand chose à l'attirance évidente qui s'est installée au fil des années entre les deux adolescents. C'est sûrement ce qui rend la situation si frustrante. Ils ne sont qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, et sont pourtant tenus à l'écart par une guerre impitoyable sur laquelle ils n'ont aucune prise. Chaque été est un retour à une réalité que la vie douce de Poudlard tend à leur faire oublier parfois. Mais là dans le Poudlard Express, ils sont comme entre deux mondes qui n'ont fatalement que trop peu de choses en commun.

Lorsque Ted lui propose de l'attaquer devant tout le monde pour arranger ses relations avec ses sœurs, Andromeda ressent un pincement au cœur. Aussi romantique la proposition soit-elle, elle n'a rien de normal, et elle n'a aucune envie de l'accepter. Elle a pris sa décision en quittant le wagon de Narcissa, du moins, elle a fait un pas vers cette décision. Il est hors de question qu'elle mettent une raclée à Ted Tonks, hormis si il tient vraiment à s'améliorer en duel. « Tonks... Je n'ai pas envie de faire ça. Je... » Elle soupire, non elle n'a aucune intention de lui dire qu'elle l'aime. C'est trop difficile. « Je pourrais t'aider à travailler tes capacités en duel, mais ce ne serait pas pour les autres. Les choses ne vont pas mieux chez nous, elle n'iront jamais mieux. J'ai pu avoir un toit pour l'été, mais Bellatrix a passé son temps à me hurler dessus, et Narcissa ne m'adresse presque plus la parole depuis... » Elle hausse les épaules, l'air sombre. « Il n'y a rien à arranger. Il faut que j'écrive à mon grand oncle Marius, c'est un cracmol, il pourra peut-être m'héberger le temps que je trouve un travail. » Tout ça est bien triste, mais Andromeda ne peut pas faire machine arrière de toute façon. On arrête pas d'aimer Ted Tonks, ce n'est pas humainement possible.

Je pourrais t’héberger, Andromeda Black, regarde-moi, j’existe, je suis bien vivant. J’ai envie de la secouer, de lui crier cette phrase en boucle jusqu’à ce que ça lui rentre dans le crâne. Tout pourrait être égoïstement bien plus simple que de savoir qu’elle va aller loger chez un grand-oncle obscur qu’elle n’avait jamais mentionné avant ça, autant vous dire que je doute pas mal de sa proximité avec la brune et du fait qu’elle pourrait être heureuse chez lui. Alors que chez moi, vraiment… On serait ensemble, on pourrait soulever toutes les montagnes de l’univers et être au moins un peu heureux. Entre personnes ouvertes d’esprit.

Pourtant, je me tais, acceptant mon sort non sans savoir que je vais longtemps m’apitoyer dessus. Il est évident qu’elle n’a aucune envie de faire machine arrière. Plus maintenant. Alors, j’acquiesce sans broncher. Je n’interfère pas dans ses plans d’avenir parce que je ne voudrais pas paraître lourd, je n’aurais pas envie de la déranger ni de la perdre.

- Ouais. C’est pas plus mal. Peu de conviction dans cette réplique un peu forcée. Je baisse les yeux, mouvement inconscient qui témoigne de mon désaccord avec mes propres paroles. Bien sûr que si, c’est « plus mal ». Un soupir plus tard cependant, j’enchaîne : je veux bien que tu m’aides en duel. N’importe quoi pour passer quelques heures en sa compagnie. Et… Andie, je suis désolé. Pour ta famille et tout ça. Vraiment.

Il est adorable, et il ne rend pas les choses faciles. Si elle s'écoutait, elle poserait sa tête sur son épaule et prendrait sa main dans la sienne. Mais Andromeda s'écoute rarement, surtout lorsqu'il s'agit de ses sentiments. Les rares fois où elle s'est risquée à l'exercice, les choses ont pris des proportions inquiétantes qui l'ont fait rebrousser chemin, même si à contrecœur. Elle ignore comment la situation va évoluer, et il est vrai que l'absence de Bellatrix change la donne dans une certaine mesure, mais aujourd'hui, c'est surtout sa culpabilité à elle qui pose problème. Elle se souvient encore bien de l'agression de Ted, du rire de Bellatrix alors qu'elle balançait Tonks dans les airs, écorchant sa peau à l'aide de sortilèges qu'elle ne connaît que parce que leur père les expérimentait sur elle pour la discipliner. Elle se souvient s'être agenouillée auprès du corps mutilé de son amant, les larmes dévalant ses joues sans s'arrêter. Elle se rappelle aussi d'avoir caressé sa joue avant de l'accompagner à l'infirmerie et d'affronter le regard suspicieux de l'infirmière, qui déjà à l'époque, peinait à concevoir qu'une sœur Black soit innocente dans l'agression d'un né-moldu comme Ted Tonks.

Malgré ses sentiments, elle a fatalement l'impression de n'être qu'une source de problèmes pour Ted. Alors reprendre leur amourette là où ils l'ont laissée sous prétexte qu'ils se manquent inévitablement après un tel été ne lui paraît pas l'idée du siècle. Elle doute que ce soit dans les plans de Tonks de toute façon. Leur rupture à l'infirmerie lui a fait suffisamment de mal pour qu'il ne considère pas l'option qui s'offre à eux d'après la brune. Andromeda doit faire cavalier seul un moment, prendre une décision raisonnée qui n'ait rien à voir avec les sentiments bourgeonnants d'une adolescente amoureuse. Et si c'est plus dur à dire qu'à faire, c'est probablement ce qui est le mieux pour Ted, pour l'instant en tout cas. Ne plus le considérer comme son petit ami lui brise le cœur. Elle n'est pas idiote, elle sait très bien qu'une ribambelle de groupies se délectent déjà de la situation. And it hurts. « Ne sois pas désolé. J'en avais aussi envie que toi. On ne l'a pas vraiment cherché, c'est arrivé c'est tout. » Elle hausse une épaule sans pour autant oser le regarder. « Ces histoires de pureté du sang, c'est vraiment de la merde, je peux pas t'en vouloir de m'avoir ouvert les yeux là dessus, au contraire. » Son regard rencontre le sien cette fois-ci. « Je ne regrette pas d'être sortie avec toi pour ce que ça vaut, même si c'est sûrement ton cas. »

« J’en avais aussi envie que toi. » La formulation blesse Ted sans qu’il en montre quoi que ce soit. Si un instant plus tôt il mourait d’envie de lui sauter dans les bras, il a dès lors l’impression qu’elle a réussi à passer au-dessus de lui plus aisément que l’inverse. Il se ravise donc, se contentant d’acquiescer à ses dénonciations sur la pureté du sang qu’il ne peut qu’approuver, pas peu fier d’avoir au moins réussi l’exploit de faire changer une Black d’avis sur la question. Puis, Ted secoue violemment la tête.

- Pourquoi je regretterais ?

S’il aurait préféré la carte de l’indifférence, l’accusation le fait bondir. Lui qui a passé l’entièreté de ses vacances à déprimer en écoutant Pink Floyd et en fumant de la weed avec une demoiselle de son quartier, également née-moldue de Poufsouffle, n’a vraiment pas le cœur à laisser croire à Andromeda qu’il regrette ce qu’il a vécu avec elle.

- Au contraire, Andie, c’était bien. J’aurais aimé que ça puisse marcher.

Pour ce que ça vaut. Il adresse un sourire triste à la brune qu’il n’arrive pas à lâcher du regard, si bien qu’il commence à se demander s’il n’a pas l’air bizarre. La nostalgie s’empare alors du blond qui se prend à rêver d’être né de sang-pur, pensée aussitôt remplacée par ce constat effrayant qui veut que tous les sang-pur soient cousins, quelque part. Non, tout compte fait, son statut de né-moldu lui convient très bien. Il en veut cependant à la société sorcière qu’il a blâmé plus qu’il n’a blâmé son ex petite amie durant ces deux mois. Et son sourire se fane lentement alors que les paysages se succèdent à travers la fenêtre du train.

- T’as raison, crache-t-il après un long silence. Ces histoires de sang-pur, c'est débile. C’est des couilles inventées pour avoir le droit de se sentir supérieur. On se croirait au Moyen-Âge.

La question de Ted, déchire le cœur d'Andromeda. Il a pourtant bien des raisons de regretter de s'être amouraché d'une sœur Black, si il s'arrête un instant pour y réfléchir. L'attaque de Bellatrix fait partie de ses raisons, et il le sait aussi bien qu'elle. Le fait qu'il n'ait absolument rien gagné à cette relation, et perdu son temps alors qu'une bonne partie des filles de l'école se damneraient pour l'accompagner au bal de Noël, n'est qu'une raison de plus à ajouter à une liste déjà longue.

Andromeda, ignore si elle pourra vivre avec sa décision, mais force est d'admettre qu'elle n'a pas le choix. Il est hors de question que Ted subisse de nouveau des attaques de la part de cousins encore à Poudlard. Elle n'a aucune intention de tenter de rattraper les choses avec Narcissa, mais la menace des vacances de Noël potentiellement passées en famille reste tout de même bien présente. Andromeda n'a en réalité aucune idée de ce qu'elle doit faire. Ted lui à fait voir les choses autrement, et elle imagine bien mal qu'il soit possible de croire de nouveau aux conneries qu'on a tenté de lui faire croire toute son enfance, même avec la meilleure volonté du monde. Et pour couronner le tout, la volonté n'est pas vraiment là non plus. Elle ne le sera même plus jamais, si elle est honnête avec elle même. Son statut de sang, lui pèse sur les épaules, et ce qui était autrefois motif de fierté, ou encore une raison de parader, n'est plus que ce qui l'empêche finalement d'être heureuse.

Si elle avait été née-moldue elle aussi, elle serait probablement sereine, la tête posée sur l'épaule de Ted Tonks, des projets plein la tête à regarder les paysages défiler à travers la fenêtre. Son cœur se serre de nouveau, tandis qu'elle répond à mi voix. « Tu as toutes les raisons de regretter, Teddy. » Elle hausse une épaule triste tout en fixant ses pieds. « Même si ça marchait très bien entre nous finalement. Le problème, c'est ma famille et ça le sera toujours. J'ai pas vraiment les moyens de m'opposer à eux pour l'instant. Le moyen-âge comme tu dis...» Andromeda est amère. Comment ne pas l'être. « En tout cas tu mérites mieux, et j'espère que tu trouveras... mieux. » Andromeda grimace. Non elle ne l'espère pas du tout. Ted Tonks devrait la pleurer toute sa vie, et ne jamais se remettre de leur courte relation, ce qui serait la moindre des choses quand on se permet faire tomber amoureuse Andromeda Black.

Les paroles d’Andromeda font déglutir Ted. Et s’il ne voulait pas trouver mieux ? Si, justement, Andie était ce qu’il y  avait de meilleur pour lui et que rien ni personne ne pourrait changer ça ? Il y a pourtant bien d’autres options : cette Poufsouffle avec qui il a passé les vacances d’été, une petite blonde débordante de gentillesse et très intelligente qui en pince visiblement pour lui au-delà de la discrétion, par exemple. Mais rien, rien ne lui semble suffire à combler l’absence d’Andromeda. Et ce ne sera pas faute d’essayer dans le futur.

Ted n’y arrive plus : jouer l’indifférence sonne faux. Ses doigts viennent timidement s’entremêler à ceux de la Black. Ce n’est pas raisonnable et il le sait, il vaudrait mieux qu’ils restent loin l’un de l’autres s’ils doivent être destinés à ne plus être ensemble, mais il ne sait pas s’il en serait capable. Il a besoin de l’ouragan Andie dans sa vie. Ses doigts se serrent un peu plus sur ceux de la jeune femme.

- Je ne sais pas si j’ai envie de chercher mieux. Est-ce que ça existe ? Il lâche un léger rire triste et étouffé, incapable d’imaginer une relation plus naturelle que celle qu’il vient de laisser à contrecœur. Tu sais, après Poudlard… si tu as besoin d’un toit, notre porte sera ouverte. On est une grande famille, on a beaucoup de place, et puis mes parents seraient contents de te rencontrer.

Perspective d’avenir un peu désespérée. Ted essaie tant bien que mal de recoller les morceaux en faisant miroiter les bons côtés des Tonks à Andromeda. Il ne sait pas encore si ses parents seraient d’accord d’héberger une personne supplémentaire et il ne serait pas fier si elle venait à accepter sa proposition, mais l’idée pourrait faire pencher la balance en sa faveur. Alors, pourquoi se priver ?

Andromeda n'a pas envie de mieux non plus. Qu'est-ce que ce serait de toute façon ? Un sang-pur insignifiant qui la rendrait malheureuse, mais qui l'aiderait à retourner dans les bonnes grâces de Bellatrix ? Il lui suffirait d'aller parader devant Rabastan Lestrange, ce qui ne serait finalement pas bien compliqué avec les arrangements des deux familles, même si ça ne changerait rien dans son cœur. Aller jouer les épouses parfaites à l'abri dans un grand manoir, pendant que son mari jouerait son rôle de parfait mangemort, en assassinant et torturant tous les né-moldus du coin, tout ça n'a pas grand chose à voir avec Andromeda Black. Sa famille ne vaut tristement pas qu'elle pas qu'elle envisage de passer sa vie à préparer le repas, nettoyer un immense manoir, et entretenir la progéniture consanguine de la très noble et ancienne famille des Black. Plus le temps passe et plus Andromeda réalise qu'elle n'est pas plus qu'un nom sur une tapisserie. Un nom et un héritage, plus qu'une fille ou une sœur. La perspective du bonheur véritable est assise à côté d'elle, avec son odeur de tabac et ses vinyles. Alors quand il entrelace leurs doigts, Andromeda se laisse faire, posant sa tête sur son épaule. « Je n'en ai pas envie non plus. J'étais très bien avec toi. Narcissa a juste tout gâché. » Andromeda crache amère.

Un sourire triste vient cependant animer ses traits lorsque Tonks propose de l'héberger. « Tes parents me détestent probablement maintenant, mais au moins on est quittes. » La gentillesse de ce garçon la désarme toujours, et c'est sûrement ce qui l'empêche de passer à autre chose finalement. Ça et toutes les choses qu'il a fait pour elle au cours de l'année précédente. L'aider à se mettre au Quidditch, l'encourager à vraiment penser par elle même, l'inciter à être la personne qu'elle voudrait être, plutôt que celle qu'on lui impose d'être. Andromeda a des tas de raisons de penser que Ted Tonks est l'amour de sa vie, c'est sûrement ce qui lui fait le plus de mal. Si ça ne tenait qu'à elle, elle lui réclamerait une seconde chance, mais les enjeux ne sont pas vraiment les mêmes pour Andromeda et Ted.

Ted apprécie plus que de raison ce rapprochement qui le laisse croire qu’il a toutes les chances du monde de récupérer son véritable premier chagrin d’amour. Si les choses étaient si simples, il aurait probablement déjà foncé. Elles ne le sont pas, cela dit, alors il serre un peu plus les doigts d’Andromeda dans les siens et ferme les yeux, se contentant de ça pour l’instant. Il se rassure comme il peut : elle se laisse faire, fait même également un pas vers lui. Tout lui indique qu’ils ont laissé trop de choses derrière eux et qu’ils y ont perdu tous les deux, et pourtant il n’ose pas en faire plus, déposant simplement un baiser discret sur le haut de la tête d’Andie, posée sur son épaule.

- Ils ne te détestent pas, insiste-t-il. Ils ne t’ont jamais rencontrée, comment pourraient-ils te détester ?

Le poufsouffle insiste sans grande conviction. Une fois le train arrêté à Poudlard, il ne restera que de la fumée de ce moment d’intimité qui d’ici quelques jours aura tant des airs de rêve que Ted se prendra à se demander s’il l’a vraiment vécu.

- Ils savent que tu n’y es pour rien pour... Bellatrix et ce qui s’est passé, tu sais ? Ils ont demandé à parler à Dumbledore quand j’étais à l’infirmerie, il leur a expliqué. Et il a même pris ta défense. Je ne sais pas si je suis supposé te le dire, mais il est derrière toi. Tu le connais, la tolérance, c’est son truc.

Le blond ponctue son discours d’un haussement de son épaule libre. Il ne sait pas l’effet qu’aura cette déclaration sur Andie qui pourrait tout aussi bien le prendre mal, mais il trouve important de lui dire qu’elle n’était pas détestée du monde entier.

Andromeda hausse une épaule. C'est très facile de la détester pourtant. Toute l'école semble le faire sans avoir le moindre problème avec ça. A l'époque, elle avait au moins Cissy, Bellatrix, et les hypocrites de sang pur pour lui donner l'impression d'avoir un semblant d'importance. Elle avait aussi son petit ami de Poufsouffle pour la regarder avec des yeux qui lui faisaient oublier que le reste du monde n'avait pas la même sympathie à son égard... Aujourd'hui à l'inverse, elle n'a droit qu'aux chuchotements, au dédain de ses camarades de Serpentard, à la peur, et à la colère de ceux des autres maisons. L'attaque de Bellatrix a laissé ses traces, et Andromeda en paye les conséquences, comme bien souvent avec sa sœur Bellatrix. Elle ne se sent plus à l'aise à Poudlard, et le sentiment ne fait que se renforcer avec le temps qui passent. Tout aurait pu être beaucoup simple, si elle n'avait été qu'une petite sang mêlé sans histoire répartie à Serdaigle. Y penser la contrarie d'ailleurs énormément, et elle soupire une fois de plus, épuisée par tout ça. L'été qui s'est écoulé a laissé sa marque, aussi bien physique, que psychologique. Ted ne pourrait pas comprendre, même si il fait partie des rares a avoir essayé. Pour lui, c'est impensable, le moyen âge, comme il le dit si bien. Pour Andromeda, c'est la réalité, son quotidien, et c'est encore pire en sachant qu'il y a tout autre chose au dehors. La brune ajuste alors son uniforme dans un réflexe de protection, il ne faudrait pas que la colère de Bellatrix soit visible à l'oeil nu par dessus le marché.

Car malgré le discours plein d'espoir de Ted, les pensées d'Andromeda reviennent inlassablement vers ce qui la tracasse : la perspective de la solitude qui l'attend à Poudlard, la trahison de Narcissa, les lettres impatientes de ce Yaxley qui pense sérieusement l'épouser à sa sortie de l'école... Andromeda n'a que 17 ans, et l'avenir lui fait déjà horriblement peur. Dans le fond, elle sait bien qu'elle n'a plus vraiment le choix, mais c'est déjà beaucoup trop pour une simple adolescente qui a clairement la sensation de sombrer. « Tu es adorable. On ne peut pas t'enlever ça. » Son regard percute celui du blondinet à côté d'elle, et elle lui sourit tendrement. Tristement. Elle aimerait ajouter les quelques trois mots qui compressent son coeur, mais à quoi bon ? Elle a bien plus important à gérer que son histoire avec Tonks dans l'immédiat. Peut être que les choses seraient différentes si elle décidait de s'épancher auprès de son ami d'ailleurs, mais la porte du compartiment s'ouvre sur quelques camarades de Poufsouffle, ce qui met fin, par extension, à la conversation qui aurait pu régler tous leurs problèmes si elle avait eu lieu. La main d'Andromeda quitte donc celle de Ted à contrecoeur. Ils n'ont vraiment pas besoin que les autres en rajoutent une couche, vraiment pas. Pourtant c'est exactement ce qu'ils font. « Tonks et Black, le retour. Cette séparation n'aura pas duré longtemps. » Malgré la blague amicale entrecoupée de rires, Andromeda se braque et leur lance un regard noir. «  On est amis, c'est un concept qui dépasse beaucoup de monde ici visiblement. » crache t-elle, sans faire le moindre effort pour paraître agréable. Son regard se tourne vers la fenêtre. Le trajet va être bien long.

La situation est aussi mignonne que triste, c’est un fait. « Adorable », Ted suppose qu’il devra se contenter de ce compliment et s’y accrocher faute de mieux, faute de pouvoir vraiment la prendre dans ses bras et la rassurer, effacer tout ce qui les empêche à présent d’être ensemble. Le Poufsouffle serre un peu plus fort la main de sa brune, geste inconscient ponctué d’un soupir qui l’est tout autant. Personne n’aurait dû se mettre entre eux et leur relation parfaite, et certainement pas pour ces raisons.

Ted aurait presque cru qu’une véritable réconciliation – pas uniquement les promesses d’un peu d’aide en duel – était possible, et s’ils avaient eu le reste du trajet pour eux, il est fort probable qu’il soit arrivé à quelque chose de concret. C’était sans compter sur trois camarades de l’équipe de Poufsouffle, très gentils mais un peu bourrins sur les bords, venus perturber son équilibre à peu près retrouvé.

- Ouais, on est amis, les gars. Vous enflammez pas.

Le mot lui fait l’effet d’un coup de poignard mais il donne raison à Andromeda. Quitte à vivre sans elle, autant accepter l’idée d’être son ami plutôt que de ne plus jamais lui parler.