we used to be best buddies but now we're not | cissy

Andromeda attacha la petite lettre à la patte du hibou familial avant de le laisser s'envoler pour Poudlard. Elle aurait dû écrire à Sirius bien avant, mais rien n'était évident ici à Londres. Elle aurait pu penser qu'elle finirait par se faire à l'idée de ces attaques constantes, du fait que sa propre sœur en soit la plupart du temps responsable, mais il n'en était rien. Elle ne se ferait jamais à l'idée. Savoir Sirius en sécurité à Poudlard lui réchauffait le cœur, mais cela restait une bien maigre consolation avec tout ce qui se passait au dehors. Le ministère n'était pas tombé, Andromeda devrait sans doute s'estimer heureuse. Elle ne pouvait pas s'empêcher de s'inquiéter pourtant. Ce n'était pas rare qu'elle reçoive un hibou express de St Mungo pour lui annoncer que Ted avait été victime d'une attaque, et qu'il était désormais aux mains des médicomages. Travailler dans ces circonstances devenait de plus en plus compliqué, et elle ne pouvait pas s'empêcher de se demander ce finirait par devenir ce pauvre monde si les choses continuaient ainsi.

L'inquiétude la rongeait, et Andromeda ne savait pas vraiment comment l'exprimer, si ce n'était en réprimant Ted à chaque fois qu'il passait deux heures de plus que prévu au pub, où qu'elle devait courir à l'hôpital pour vérifier que lui et sa fille étaient en vie et en sécurité. Ce n'était pas vraiment ce qu'elle s'était imaginé de sa vie, et c'était sûrement stupide de sa part d'ailleurs. Ça n'aurait jamais pu se passer bien. Elle l'avait su le jour de son mariage lorsque elle avait tout simplement éclaté en sanglot dans la salle de bain avant de prononcer ses vœux sans la moindre famille à ses côté pour célébrer cet événement pourtant heureux avec elle. Ted l'avait rejoint, et sans s'éparpiller dans un long discours, et il lui avait dit que tout irait bien. Elle avait voulu le croire ce jour là, il lui en avait donné envie en tout cas. Les Tonks n'étaient pas malheureux, et en dépit du bordel que Ted était capable de créer en passant une après-midi de congé à la maison, Andromeda ne regrettait pas sa décision. Il lui fallait simplement accepter le fait qu'elle avait choisi son camp, et que la demi mesure ne pourrait jamais exister avec la famille Black.

De façon totalement ironique, sa famille avait décidé de se rappeler à son bon souvenir ce jour là. Cette fois il ne s'agissait pas de Bella attaquant Ted, mais de Narcissa plantée au milieu du chemin avec ses grands airs. Andromeda s'arrêta un instant pour contempler le tableau avec une expression de mépris qui se mariait particulièrement à sa physionomie. D'ordinaire, elle aurait fait profil bas, se serait contentée de l'ignorer en prenant le petit chemin à gauche qui évitait les problèmes, mais pas aujourd'hui. Pas après l'attaque de Bella qui restait malheureusement toujours fraîche dans son esprit. « Qu'est-ce que tu fais ici ? » Demanda t-elle sèchement avant d'ajouter avec provocation. Fréquenter autant de bouffondors, lui donnait sûrement des ailes. « Je ne savais pas qu'on laissait entrer les mangemorts au ministère. Quoi qu'en fait on les laisse même travailler ici, ça ne devrait pas me surprendre. » Andromeda était plutôt du genre à garder tout pour elle, offrir un silence glacial et couper les ponts par instinct de préservation, l'attaque récente de Ted avait évidemment changé la donne. Il lui fallait un responsable, et Narcissa jouant les femmes du monde hypocrite était exactement ce qu'il lui fallait pour extérioriser sa colère.

Faire partie de l'élite du monde sorcier inclue son lot de petites obligations, de visites de politesse et de ronds de jambes. Par chance, Narcissa excellait dans cet art délicat, préparée depuis sa plus tendre enfance à tenir précisément ce rôle. Celui d'une épouse, d'une mondaine mais aussi d'une femme de rang et de sang pur et noble, imposant le respect voire la crainte, même dans les couloirs du Ministère.

Le comité des fêtes venait de se réunir et, évidemment, la jeune Mrs Malfoy y tenait une place de choix. Vice-présidente, son poste favori. Un soupçon d'autorité, un minimum d'investissement concret dans des choses aussi triviales que réserver une salle de réunion, une bonne presse. La raison pour laquelle elle faisait partie de ce petit club de vieilles dames distinguées, toutes épouses de fonctionnaire haut placé, toutes de bonnes relations. Aujourd'hui, de nets progrès avaient été faits et la jeune blonde était parvenue à imposer en douceur ses idées, novatrices pour qui pensent encore qu'il convient de calligraphier des invitations et de commander des orchidées enchantées à l'unité.

Un petit air satisfait éclairant ses traits délicats, Mrs Malfoy salua donc ses comparses et s'attarda en conversation, essayant tant bien que mal de s'éclipser. C'est qu'elle n'avait pas la journée, tout de même. Mais elle eut à peine le temps de faire volte-face qu'une furie brune se mit à lui hurler dessus. Pendant une seconde de confusion, il lui sembla que Bellatrix avait perdu l'esprit pour de bon et était venue la trouver là, Merlin allait savoir pour quoi. Mais la réalité était presque encore plus surprenante. Andromeda. Sifflante, accusatrice, pleine de verve et de rancoeur. Echevelée, fatiguée, peinée.

Un silence pesant plana, une des bonnes dames du comité se tenait juste derrière elle, outrée, la main sur le coeur. Il faut dire que la vieille MacMillan ne supportait que mal les grandes effusions. Une famille faible, malgré la pureté de leur lignée. Une famille dont Narcissa avait besoin dans son carnet d'adresses, pour maintenir les apparences, pour se protéger. Elle parvint à forcer un sourire, calme, mesurée. En apparences. « Et bien, j'avais une réunion figures-toi, il n'y a pas que des messieurs le nez dans la paperasse ici, ces dames et moi-même nous affairons pour que le gala de Noël soit des plus parfaits. » Sourires, hochements de tête courtois, éparpillement des dames. Elle fit quelques pas, essayant d'inciter Andromeda à la suivre. Qu'elle déverse sa bile, s'il le faut, mais pas ici. « Et allons discuter ailleurs, il ne fait pas bon proférer de telles accusations ici. On pourrait croire que tu fréquentes des individus un peu trop prompts à harceler les gens de bonne famille. » Les oreilles de la mère MacMillan étaient encore dressées, comme celles de Greengrass et Doge. Les menaces voilées, ça pouvait marcher dans les deux sens. Le petit groupuscule de Dumbledore n'avait pas que des admirateurs dans ces murs.

D'une voix basse, profonde, plus proche de celles de ses soeurs que de son ton cristallin usuelle, Cissy chuchota précipitamment. « Andie... S'il te plaît, ne fais pas ça. Tu pourrais avoir des ennuis toi aussi. » Pas qu'elle en ai quelque chose à faire, non. Le sort de sa grande soeur ne lui importait pas le moins du monde. C'était une traîtresse et une impie. Elle méritait bien pire que des messes basses dans les allées du Ministère. L'ombre de leur mère flotta un instant derrière elle et Narcissa ne put s'empêcher de se redresser, figée et fière, éternellement Black. « C'est à force de fréquenter des moldus que tu n'as plus une once de bonne manière? » Le mépris était revenu dans sa voix, l'assurance dans son maintien. Mais sous la surface, tout bouillonnait.

Andromeda adopta une resting bitch face assez impressionnante pendant tout le discours de Narcissa, qui essayait tant bien que mal de se montrer sous son meilleur jour pour quelques vielles dames du ministère, dont elle avait sûrement besoin pour sa couverture. Andromeda avait envie de vomir. Elle ignorait si elle connaissait juste beaucoup trop Narcissa ou si les gens étaient vraiment naïfs de croire que la descendante des Black puisse adopter une position modérée, alors qu'on l'attaquait elle, assez régulièrement sur ses origines, malgré son mariage avec un né-moldu. Il y avait quelque chose d'absolument hypocrite dans la façon dont les choses s'organisaient au ministère, et tout ça avait le mérite d'irriter Andromeda au plus haut point. Cette histoire de gala de Noël, lui déclencha bien entendu un rire méprisant et à en juger par l'expression de cette Mrs MacMillian, Andromeda avait presque l'impression qu'elle était elle même la mauvaise fréquentation de Narcissa. Un comble.

Docile, Mrs Tonks se laissa cependant entraîner à l'écart par sa sœur. Loin d'en avoir fini avec elle pour autant, Andromeda, ne put retenir un regard scandalisé face à l'outrecuidance dont pouvait faire preuve Narcissa. « Je me fiche des ennuis que je pourrais avoir Narcissa. On nage dans l'hypocrisie la plus totale ! Personne n'est dupe sur les petites activités de ton mari, mais tu les payes beaucoup trop cher pour qu'ils osent dire quoi que ce soit, un luxe que tu ne peux malheureusement pas t'offrir avec moi. Pense ce que tu veux de mes bonnes manières, les valeurs de la famille Black, ça fait longtemps que j'ai mis une croix dessus. Notre sœur, à qui tu vas sûrement tout raconter dans une demi heure, a envoyé Ted a St Mangouste la semaine dernière, mais je suppose que tu es déjà au courant, puisque vous êtes si proches elle et toi... » Reproche teinté d'une jalousie incompréhensible. Beaucoup de sentiments contradictoires se mélangeaient dans le cœur d'Andromeda.

« Passe lui le bonjour de ma part, et dis lui d'aller se faire foutre. », lança t-elle, à la fois furieuse, et fière de laisser sa langue se délier pour une fois. Andromeda était bien consciente qu'elle allait s'attirer beaucoup d'ennuis en proférant de telles accusations, mais le sentiment de lâché prise en lui même était libérateur. Elle se calma alors quelque peu et avisa Narcissa de toute sa hauteur. Plus bas, elle reprit non sans une certaine douleur dans la voix. « Bellatrix est malade, mais toi... Toi tu n'as aucune excuse. », elle cracha finalement le reproche qu'elle avait gardé au fond d'elle pendant de trop nombreuses années. Narcissa était un tout autre type de personne que Bellatrix. Elle était modérée, intelligente, mais elle avait fait le choix de se complaire dans le modèle suprémaciste de la famille, alors qu'elle aurait eu tout à fait les capacités de le remettre en question. Au lieu de ça, elle avait surtout coupé les ponts, continué à jouer les hypocrites au sein de ses petits comités qui organisent des galas de charité.

Narcissa parvint à écarter sa soeur du troupeau de mondaines, sachant toutefois pertinemment qu'elle ne se laissait entraîner que pour mieux imploser. Et ça ne manqua pas. Sa fougue, qu'elle avait oeuvré à bien camoufler, qu'elle avait appris à utiliser à bon escient se déversait stupidement à travers le hall, comme si elle était une Gryffondor mal lunée partant à la chasse aux serpents. La blonde la toisa un instant, plus déçue que méprisante. Andromeda avait été son modèle, la figure parfaite entre espièglerie et dignité, douceur et force. Elle avait admiré sa différence, ses petits affronts à Mère, sa pointe d'audace. Si seulement elle avait su. Que tout ça n'était que le prémisse de sa déchéance, qu'elle deviendrait une petite employée de bureau au sang terni, perpétuant impunément la souillure de son nom. Ces pensées venimeuses étaient celles des Black plus que les siennes, même s'il n'y a guère de différence. Il était plus simple de la haïr, de la considérer comme une traîtresse que de reconnaître sous sa colère l'ombre de sa grande soeur tant aimée.

Sa révélation coupa toutefois l'élan de rancoeur de Cissy. Qu'avait fait Bellatrix? Ses yeux s'écarquillèrent un instant, puis elle retrouva sa posture tranquille et hautaine. Elle ne devait pas lui montrer qu'elle ignorait tout de cette attaque. Déjà qu'elle la condamnait d'avoir choisi son camp, si elle savait en vérité combien sa position était périphérique, elle ne ferait que se complaire d'avantage dans son sentiment de supériorité. Nul doute qu'Andie était au coeur du petit groupuscule de Dumbledore, qu'elle glanait des informations au Ministère elle aussi, interceptant des messages d'autres pays ou officiant comme lien auprès des créatures magiques dont elle s'était évertuée à apprendre le langage primitif. Elle rirait bien si elle savait toute la prudence dont sa cadette faisait preuve.

Toujours était-il qu'il lui fallait réagir. Elle ne pouvait la laisser lui parler de la sorte. Sa grossièreté lui fit hausser un sourcil, décidément, ce sang-de-bourbe avait une mauvaise influence sur tous les plans. « Bellatrix a agi de façon... disproportionnée. Comme tu le dis si bien, elle est malade, cela ne veut pas dire qu'il faut l'accuser de choses pareilles en place publique. » Le déni, une solution préconisée par l'héritage Black. Si on pouvait rayer les gens de sa vie d'un simple coup de baguette sur un arbre généalogique, on pouvait tout aussi bien choisir la vérité qui nous convenait le mieux. « J'apprécierais d'ailleurs que tu baisses d'un ton, surtout si c'est pour répandre des calomnies sur le dos de mon époux. Il travaille dur pour le bien de notre communauté, le Ministre lui-même lui confie de grandes responsabilités et je n'apprécie absolument pas tes insinuations et ta perfide jalousie! » L'épouse fidèle et malmenée, une de ses meilleures cartes. Pas pour Andie bien sûr, l'une comme l'autre ne savait que trop bien ce qu'il en était. Mais pour cet agent de la sécurité qui les observait du coin de l'oeil, ne sachant pas s'il convenait d'intervenir ou non dans cette esclandre familial. Pour ces employés du Ministère qui tournait la tête pour y regarder à deux fois, reconnaissant le minois élégant et la crinière blonde de Mrs Malfoy, contre la tignasse brune et la verve cuisante de Mrs Tonks. Eux devaient garder l'image qu'elle voulait leur imposer. Pour Andie... Pour Andie c'était trop tard.

Narcissa était peut-être passée outre sa dernière remarque, mais elle ne l'en avait pas moins affectée. Que devait-elle excuser au juste? Son rang, sa fortune, son mariage? Son aînée pouvait rejeter les conventions et leur noble famille tant qu'elle le voulait, cela ne voulait pas dire qu'elle-même devait justifier d'un choix différent. Elle aurait pu refuser la voie royale qui s'ouvrait devant elle, renier son héritage et ses principes, que les Black portaient depuis des générations, dans le seul but de préserver la culture des sorciers, revenir à une société où les choses avaient du sens, une place. Le désordre actuel n'était certainement pas plaisant et les révolutionnaires du dimanche finiraient bien par se rendre à l'évidence : une seule voix permettrait aux sorciers dignes de ce nom de prospérer. Mais, en attendant, il fallait survivre et assurer ses arrières. Et la jeune Malfoy ne se laisserait pas acculer, ni par Andie, ni par personne. « Et pour ta gouverne, ce serait plutôt à toi de t'excuser. Tu as brisé le coeur de notre mère en épousant ce moins que rien, tu nous a tous fait beaucoup de peine en refusant d'entrer dans le droit chemin. Nous ne voulions que le meilleur pour toi et tu as décidé de tout gâcher. Il est inutile de vouloir me corrompre ou me manipuler, je ne suis pas aussi faible que toi. » Croyait-elle à son discours? Régurgitait-elle les propos que Druella tenait depuis des années? Essayait-elle d'exprimer, dans sa logique tordue, une souffrance, un manque à Andromeda? La jeune femme aurait été bien incapable de le savoir et aurait sans doute nié tout sentiment de nostalgie ou de tristesse qui fourmillait dans sa gorge. D'autant qu'ils étaient noyés sous des années d'obéissance et des croyances fermement ancrées, que même l'amour d'une soeur ne pouvait effacer.

Bellatrix qui agit de façon disproportionnée, Andromeda a envie de rire at the understatement of the year. Bien sûr qu'elle est malade and Narcissa is feeding her insanity, by excusing everything she does, like she always does. Mais Andromeda n'est pas prête à trouver des excuses à Bellatrix pour avoir tenté d’assassiner la seule famille qui lui reste qui n'ait pas perdu complètement l'esprit. Du moins, pas de cette manière là en tout cas. Et si la brune, ne peut pas s'empêcher d'avoir ironiquement de la peine pour son aînée, la cadette, ne lui inspire que du dégoût à l'inverse. Narcissa est de la pire espèce, sans doute, parce qu'Andromeda a toujours pensé qu'elle était la plus intelligente des trois. Lorsqu'elles étaient enfants, Cissy était la plus raisonnable, la plus aimante aussi. Il est d'ailleurs très difficile pour la paria de la famille Black de revenir sur son passé pour y puiser un semblant de bons moments finalement. Lorsqu'elle finit par inévitablement remettre en contexte ses bons souvenirs, ils finissent généralement par lui sembler tout aussi putrides que la relation haineuse qu'elles entretiennent elle et ses soeurs. Andromeda n'a pas de passé dont elle puisse être fière ou même nostalgique, que le présent pour compenser. C'est sans doute le poids d'avoir eu à faire un choix qui ne peut pas se regretter. Se rappeler les après-midi à jouer dans l'immense jardin d'une tante raciste ne risque pas de l'émouvoir, du moins, la logique le voudrait.

« Toi aussi tu perds l'esprit Narcissa, si tu estimes que je n'ai pas le droit de l'accuser d'avoir essayé d'assassiner mon mari! », crache t-elle hors d'elle. « Que tu penses que Ted n'est rien d'autre qu'un moins que rien, ne change pas ce qu'elle a fait. Je ne baisserai pas non plus d'un ton, parce que je suis hors de moi et que contrairement à toi, je n'ai rien à cacher! Quant à ma prétendue jalousie...» Andromeda ne peut pas retenir un rire glacial, presque aussi effrayant que celui de leur aînée. « Laisse moi rire. Si j'avais voulu de l'argent des Black, j'aurais continué de jouer les mange-merde jusqu'au bout comme toi, j'aurais épousé Rabastan, et pourquoi pas enfanté plein de bébé mangemorts, en me tournant les pouces dans ton grand manoir, le tout en buvant du thé avec ma sœur préférée. » Un programme digne de la parfaite petite Narcissa qui se laisse vivre et qui n'a pas d'autres ambitions que de jouer les potiches au bras de son mari lâche. « Ce qui semble pas de traverser l'esprit Cissy, c'est que je ne t'envie pas du tout. », ce qui ne peut pas être plus vrai. « C'est pas moi qui suis faible Narcissa, c'est toi, c'est la seule explication. Je refuse de croire que tu sois stupide à ce point. »

Son discours transpire le lavage de cerveau en règle et pourtant Andromeda ne peut pas s'empêcher de se demander si elle croit seulement à ce qu'elle dit où si elle a tout simplement pris la décision de se contenter de cette version par confort. L'un comme l'autre, ces hypothèses rappellent tristement à Andromeda que rompre avec la famille Black était la meilleure décision de sa vie. « Get out of my way. », crache t-elle en la poussant pour passer.

La rage d'Andromeda était inattendue. Certes, Narcissa savait que sa soeur avait du tempérament, elle ne l'avait pas encore oublié. Mais pendant des années, sa soeur avait su se contenir. Elle avait eu plus de fougue qu'elle, sans sombrer dans la démence de leur aînée. Elle avait été l'équilibre des soeurs Black, le lien entre la blonde, docile et minutieuse et la la brune, impétueuse et incontrôlable. Une jeune fille caractérielle mais raisonnée, vive mais sérieuse. Sans elle, Narcissa et Bellatrix avait été contrainte de trouver un nouvel équilibre et la benjamine s'était sentie dépassée et déboussolée. Elle n'avait pas été aussi proche de Bella, avant. Elle lui avait fait peur, parfois. Encore aujourd'hui, la jeune Mrs Malfoy s'inquiétait des élans les plus dangereux de sa soeur, craignait de voir arriver le jour où elle ne pourrait plus la contenir, le jour où elle irait trop loin. Et attaquer ce Tonks, s'était s'en approcher dangereusement. Et maintenant, Andie n'était plus de son côté.

Elle se tenait là, au milieu d'un couloir bondé à vociférer comme une furie. Cissy avait toujours trouvé que les gens exagéraient la ressemblance entre ses soeurs, par jalousie d'abord, par force de l'habitude ensuite. Mais en cet instant, les yeux étincelants de haine et la bile qu'elle crachait lui rappelaient indéniablement Bellatrix. Personne d'autre ne procurait ce frisson dans l'échine. Mais elle devait se ressaisir. Narcissa Malfoy ne pouvait pas laisser une traître à son sang lui parler de la sorte, la bousculer, sous le regard curieux de ses pairs.

Les narines retroussées de mépris et de dégoût, elle se redressa, épousseta son épaule malmenée, puis jaugea sa soeur d'un regard glacial. « Tu ne sais pas de quoi tu parles Andromeda. » Sa voix claqua dans l'air, raisonna presque même si elle avait à peine hausser le ton. Menace ou avertissement inconscient, Narcissa n'aurait su le dire. Mais elle ne laissa pas cette pensée la tarauder et se lança bien vite dans un discours tout à fait différent. « Tu peux cracher ton venin autant que tu le veux, c'est toi qui en paieras les conséquences, pas moi. Continues donc à croire que c'est toi qui as renié la maison Black, que tu as fais un choix révolutionnaire. Mais, en vérité, tu as commis une erreur et elle t'a coûté ta famille et ton avenir. » Cruelle et suffisante, la blonde fit un pas en direction d'Andie et se fendit d'un ricanement théâtral. « Tu es une révoltée et moi une potiche, c'est bien ça? Regardes-toi enfin et dis-moi qui de nous deux semble la plus à l'aise? Laquelle d'entre nous mène une vie agréable et prospère? Laquelle est exposée au rejet de sa communauté à cause d'une idiotie adolescente et la regrettera bientôt, si ce n'est déjà fait? Si cela t'aide à dormir, continues à penser que je suis faible et sotte et que tu as été courageuse. Mais nous savons très bien ce qu'il en est. »

Cissy ajusta sa cape, légèrement dérangée par la bousculade et arrangea lentement ses cheveux immaculés. Elle prit une inspiration discrète, rassemblant discrètement ses esprits. La rencontre l'avait ébranlée, plus émotionnellement que physiquement. Depuis combien de temps les deux soeurs n'avaient-elles pas échanger un mot? La blonde était bien incapable de s'en souvenir. Des années. Et que leur première conversation soit aussi publique, aussi violente lui faisait plus de peine qu'elle ne voulait bien l'admettre. Elle n'espérait rien, on l'avait mieux élevée que ça et elle était bien trop rodée pour se bercer d'illusions. Mais la benjamine des Black avait envie de croire qu'elle avait raison, qu'en appuyant un point sensible, elle pouvait mettre un peu de plomb dans la cervelle d'Andie, la faire revenir sur le droit chemin. Elle s'y était efforcée quelques temps, au début. Et évidemment, Druella n'accepterait jamais de réintégrer sa fille déchue à sa vie, mais Narcissa saurait être plus indulgente. Si seulement sa soeur pouvait faire un effort.

Mais elle ne pouvait laisser son esprit divaguer de la sorte. Andromeda Black n'existait plus. Elle avait été remplacée par Mrs Tonks, une traîtresse qui déshonorait son héritage, des traditions millénaires, un équilibre social toujours menacé. Elle n'était rien pour elle. « Si tu en as fini avec tes débordements, il me semble que tu as un emploi à sauver. Et il se trouve que j'ai mieux à faire que de me faire crier dessus en place publique. »