a little something we need to talk about | Hestia

Gideon a tenté, à maintes reprises, de tomber par hasard sur Hestia Jones. Mais il n'est pas chose aisée de tomber sur les gens par hasard, croyez-le ou non. Alors il a fini par se résoudre à faire ce que tout le monde aurait fait à sa place - il a décidé de prendre son courage à deux mains et de lui rendre visite de manière un peu plus officielle. Et comme il ne sait pas où elle vit - parce qu'elle vient de rentrer et qu'il n'existe aucune raison logique à ce qu'il le sache de toute façon - il a décidé d'aller la cueillir là où elle travaille, ou en tout cas là où elle est susceptible de se trouver. Le Ministère se dresse toujours aussi fièrement dans ses décors somptueux. Gid déteste cet endroit. Il le trouve sombre, et surtout, il sait ce qu'il en est aujourd'hui des Sorciers qui arpentent les couloirs du Ministère. La gangrène se poursuit, gagne les moindres recoins de l'imposant bâtiment. Tout bien réfléchi, d'ailleurs, peut être qu'il n'aurait pas dû venir ici ; il y a fort à parier qu'il y a plus d'ennemis que d'amis. Mais ça l'amuse, en même temps, de parader sous le nez de ces Mangemorts qui se pensent encore discrets ou impressionnants. Et puis, aujourd'hui, il n'est pas question de parler de Mangemorts ou de leur donner une leçon.

Juste d'avoir une petite discussion sérieux avec sa revenante d'ex-future belle-sœur. Quelque chose dans ce genre là.

On le guide en le regardant d'un air suspicieux, étrange, mais il ne s'en offusque pas. Effectivement, pour le plus grand nombre, il n'a pas grand chose à faire là. Peu importe. Il erre dans les couloirs jusqu'à trouver une porte, et un peu comme un idiot - ou comme un enfant - frappe. « Hestia Jones, quelle surprise ! » il lance tout de même quand la porte s'ouvre. Il ne sait pas vraiment ce qu'elle fait là, d'ailleurs - il ignore si sa présence en Angleterre est définitive ou si elle ne fait que passer. « J'espère que je ne te dérange pas parce qu'il est hors de question que je revienne une nouvelle fois un autre jour, et il faut que je te parle », précise-t-il. Il entre sans attendre qu'elle l'y autorise et referme la porte derrière lui. « Je suis désolé pour ta mère », il ajoute finalement en haussant une épaule. Il n'affectionnait pas le couple qu'elle formait avec son frère, c'est vrai. Mais ce n'est pas un monstre tout de même.

Le Ministère de la magie était en ébullition, à l’approche des fêtes de fin d’année. Il y avait un événement en particulier que beaucoup attendaient avec impatience : le bal de Narcissa Malfoy, auquel tout le monde avait été convié par une très belle invitation, sans avoir la possibilité de s’esquiver. Tout le monde n’était pas enthousiaste à l’idée d’assister à ce bal, et je faisais partie de ces personnes. Car cela signifiait des heures supplémentaires pour boucler des dossiers avant ce fichu bal. Je retournais dans mon bureau en claquant la porte derrière moi, après un énième briefing en compagnie d’autres membres du département. La pile de papiers que je transportais s’écrasa sur mon bureau, sans ménagement, comme pour faire écho à l'agacement que je ressentais en raison de tout ce travail à faire. D'ailleurs, je n’eus pas le temps de m’asseoir que des coups furent frappés à la porte que je venais tout juste de refermer.

Retournant près de l'entrée du bureau, je tournais la poignée de la porte, avant de l’ouvrir. Je faillis la refermer immédiatement, stoppant avec peine ma main d'esquisser le moindre mouvement. La raison en était simple : je reconnus sur le pallier le frère jumeau de mon ex-fiancé. Impossible de ne pas le reconnaître, que ce soit physiquement ou à sa manière de parler. « Gideon Prewett en personne » constatais-je avec un enthousiasme feint, abandonnant l’idée de lui fermer la porte au nez, quant bien même j’aurais beaucoup aimé voir sa réaction. Voilà une personne que je me serais passée de revoir. Si je ne l’avais pas croisé pendant ces quelques semaines à Londres, la chance avait tourné. Ou plutôt Gideon avait décidé de forcer le destin en se pointant comme une fleur devant ma porte. D’ailleurs, Prewett pénétra dans la pièce sans attendre d’invitation, refermant la porte derrière lui. Mais oui vas-y, fais comme chez toi, pensais-je. J’avais très envie de lui répondre que même si j’avais été occupée avec le Ministre de la magie, Gideon Prewett n’aurait pas attendu pour s’entretenir avec moi: « Mais oui bien sûr, parlons. Assis-toi, je t’en prie » proposais-je poliment indiquant d’un geste le siège en face de mon bureau. Je n’allais pas lui proposer un café ou un thé, car lui comme moi n’avions très certainement aucune envie que cette rencontre s’éternise. Le trentenaire présenta tout de même ses condoléances, auxquelles je répondais par un simple « merci ». Il n’y avait pas lieu à s’épancher sur le sujet, même si cette attention avait réussi à m’adoucir l’espace d’un instant. Si notre mésentente était une légende aussi célèbre que la capacité infinie des Prewett à ingurgiter de l’alcool, il n’y avait aucune raison de supposer que Gideon n’était pas sincère sur ce coup-là.

Je m’installais à mon bureau, tandis que le jeune homme faisait de même en face. « Je t’écoute Gideon, pourquoi est-ce que tu es venu ? » assenais-je sans attendre, afin d’entrer dans le cœur du sujet. Il s’agissait probablement de Fabian, car il n’y avait qu’une seule personne qui pouvait nous mettre d'accord.

Hestia Jones est une jeune femme charmante. Elle a presque tout pour plaire, quand on y pense, et avec un peu de recul, sans doute aurait-elle fait une belle-sœur correcte, ou acceptable, plutôt. Sauf que Gideon n’avait aucune envie que qui que ce soit lui enlève son frère, à l’époque. Il réalise maintenant, avec un peu de recul sur la situation, avec les éléments en sa possession, et notamment le fait que Fabian se retrouve esseulé et veut passer le temps à aller combattre sur le front des Mangemorts avec lui, qu’il aurait peut-être mieux fait de laisser partir son frère. Mais c’est trop tard pour les regrets, maintenant, il n’a plus qu’à assumer la conséquence de ses actes en silence. Fabian se bat, il risque sa vie tous les jours pour que les générations futures puissent avoir une chance d’exister en paix, et Gideon n’y peut rien – il n’a qu’à se faire à l’idée. Il soupire un peu, une fois dans le bureau. Un bureau classe, il faut bien reconnaître ce qui est. Gideon détesterait travailler ici, à la place d’Hestia ou de la femme de Ted. Plus le temps passe, plus le Ministère est ouvertement aux mains des Mangemorts.

Il hoche la tête quand elle le remercie et se laisse tomber dans le fauteuil en face du sien, un peu comme s’il venait pour un entretien formel. Il croise les jambes et la dévisage un instant – elle a l’air fatiguée, mais quelque chose dans ses traits fins a changé. Un peu de maturité, peut-être. Le même genre de maturité qu’ils ont fini par tous acquérir, de gré ou de force. La maturité des années difficiles qui s’écoulent. La maturité de la guerre et des soucis d’adultes. Ou alors peut-être est-ce simplement la tristesse du deuil récent qui habite ses traits – Gideon n’en sait rien, et il ne posera pas la question, parce qu’il n’existe aucune intimité entre eux.

« Je suis venu te parler de Fabian, ce qui, je me doute, va te faire sourire », il précise en haussant une épaule. L’avantage de Gideon Prewett, c’est que s’il est, la plupart du temps, un gamin arrogant prêt à risquer sa vie et à faire le pitre en toutes circonstances, il est également capable de beaucoup d’autodérision et de recul sur ses propres actions. « Tu n’es pas sans savoir qu’il fait partie de l’Ordre, Hestia », il poursuit, sans lui laisser le temps de répliquer ou lui donner le luxe de pouvoir placer une pique quelconque au milieu de leurs échanges. « J’ai peur qu’il ne se batte sans vraiment prendre la mesure du risque qu’il encourt, un peu comme se battrait un désespéré ». Un peu comme il se bat, lui. Mais mourir, pour Gideon, n’est pas un drame. Perdre Fab, en revanche, il ne peut même pas l’envisager. « Je n’ignore pas que tu as sur lui un certain impact bénéfique, et je suis là pour te demander de le raisonner. Il n’abandonnera pas la guerre, c’est certain. Mais il faut qu’il fasse attention à lui », explicite-t-il. « Il ne m’écoute pas quand je le conseille, je ne suis que son idiot de frère casse-cou. Mais toi… toi, c’est différent ».

Loin de moi l’idée de paraître impolie aux yeux de cet invité inattendu, je ne pouvais m’empêcher de toiser Prewett, assis en face de moi avec un air totalement décontracté. Je m’adossais moi-même au dossier de mon fauteuil. J’essayais de déceler sur son visage le moindre indice de la folie qui avait réussi à convaincre cet homme de franchir le pas de mon bureau. La seule réponse qui me venait en tête était Fabian, bien entendu. Si ce n’est son frère et mon ancien fiancé, rien d’autre ne pouvait lier Gideon Prewett et Hestia Jones. Je me demandais d’ailleurs si Gideon n’était pas venu justement pour me mettre en garde. L’aîné des Prewett ne voyait sûrement pas d’un bon œil le retour de la fiancée qui avait brisé le cœur de son frère, et ce d’autant plus qu’il avait sans aucun doute eu vent de ma rencontre improvisée dans un café avec Fab. Cela étant, après ces trois années, j’espérais tout de même que Prewett avait gagné en maturité et qu’il ne me poserait pas le même problème qu’auparavant.

L’amorce de Gideon ne l’étonna pas plus que cela. Un sourire naquit au coin de mes lèvres, sans que je puisse y faire quoi que ce soit. Je me mordis l’intérieur de la joue pour éviter une réplique sarcastique en retour. Venir jusqu’à moi n’avait sûrement pas été une partie de plaisir pour ce fier Gryffondor, d’une part. Et d’autre part, j’étais prête à écouter ce qu’il avait à dire que Fabian. Je perdis bien vite mon sourire lorsque le jeune homme enchaîna. Fabian faisait partie de l’Ordre du Phœnix. À cet instant précis, j’aurais beaucoup aimé pouvoir allumer une cigarette, voire plusieurs. Non, je ne savais pas qu’il risquait sa vie officiellement dans un groupe de résistants. Non, je ne savais pas qu’il s’était engagé à ce point dans la guerre contre les Mangemorts. Même si je m’en doutais. Après une conversation avec lui, ainsi qu’avec Andromeda, il était évident que Fabian était impliqué plus que de mesure. Cependant, l’entendre de la bouche de Gideon n’était résolument pas facile à digérer. Mes mains en tremblaient ostensiblement, lorsque je décidais de boire une gorgée d’eau. J’en voulais à Gideon de ne pas l’avoir empêché de sombrer dans cette bataille dangereuse. Je m’en voulais personnellement de ne pas avoir pu anticiper la réaction de Fabian. Mais aussi et surtout, j’en voulais à Fabian de ne pas pouvoir faire la part des choses et de se battre comme un désespéré, ainsi que l’avaient décrit successivement Andie et Gideon.

« Je ne savais pas qu’il avait rejoint l’Ordre » répondais-je à mi-voix, soudainement très fatiguée. « Fabian ne m’en a pas parlé. » Étrangement, je me sentis déçue que Fabian ne se confie pas à moi ce sujet, et ce, alors même que j’étais celle qui avait tout tenté pour l’éloigner d’ici. Celle qui n’aurait pas supporté il y a trois ans que Fabian soit en première ligne pour combattre des êtres dénués de toute humanité. Je gratifiais Gideon d’un regard empli de reproches. « Ça, pour être un idiot, tu l’es ! Good job, Prewett, seriously. Tu prenais clairement ton rôle de grand frère plus à cœur lorsque j’étais fiancée à Fabian. » Les mains portées à la tête, je n’arrivais pas à dissimuler mon inquiétude grandissante pour celui que je considérais comme l’un des hommes de ma vie. Je jetais un regard à son double, qui était venu m’en parler. Je m’en voulais un peu de lui avoir parlé sur ce ton, mais pas tellement en vérité. Parce que, après tout, je disais la vérité : Gideon avait toujours montré à quel point il désapprouvait notre relation. Un soupir s’échappa de mes lèvres, alors que j’essayais de trouver une réponse appropriée à donner à Gideon, qui était venu dans l’espoir de trouver un allié. « Je n’ai pas réussi à le raisonner il y a trois ans, qu’est-ce qui te dit que je pourrais réussir à le faire maintenant ? Le raisonner tu dis ? Vous êtes des Gryffondors, vous êtes têtus comme des hippogriffes. » Je me tus. Il était inutile d'envenimer la situation, en prenant Gideon pour cible. Lui aussi était tout aussi inquiet pour son frère que je l'étais. Dans une tentative de tempérer mes ardeurs, j'ajoutais d'une voix plus posée : « J'ai essayé d'aborder le sujet avec lui lorsque nous nous sommes revus à mon retour, même si je ne savais pas encore à quel point il était... impliqué. » Et Fabian ne m'avait évidemment pas prise au sérieux. Great start. « Depuis combien de temps, Gideon ? » je finis par demander, plus par curiosité que par véritable intérêt. Le simple fait que Fabian ait rejoint l'Ordre était suffisant en soi.

Evidemment, il fallait que la nouvelle soit une annonce, qu'Hestia ne soit pas encore au courant. Gideon grimace et secoue la tête. Tout le monde le sait, que les Prewett font partis de l'Ordre. Tout le monde sait qu'il est de leur vocation de gagner cette guerre. Tout le monde sait qu'ils se battent avec conviction et qu'ils donneront leurs vies si nécessaire - mais pas Hestia, évidemment. Il fallait qu'elle l'apprenne de la bouche de Gideon, et ça, le rouquin le regrettera sans doute en voyant la mine déconfite, déçue et énervée de Fabian, tout à l'heure - ou dans quelques jours. Comment rattraper ça ? Gideon n'en sait rien, mais il laisse respectueusement le temps à Hestia de se faire à la nouvelle, ne doutant pas réellement qu'elle représente un choc auquel il vaut mieux qu'elle se fasse. Lui non plus n'apprécie pas forcément la présence de son frère à ses côtés, et pas parce qu'il estime que Fabian n'est pas digne de se battre - en réalité, c'est bien plus compliqué que ça. Egoïstement, sans le moindre doute, Gideon voudrait mourir avant son frère. Et il est à peu près persuadé que l'un d'eux laissera sa vie dans cette guerre - et il préfèrerait que ce soit lui. Non. C'est faux. Gideon ne supporterait pas que ce soit quelqu'un d'autre que lui. Il ne supporterait pas de vivre sans son frère. Fin de l'histoire.

« Evidemment, qu'il ne t'en a pas parlé. D'abord, parce qu'on ne crie pas sur tous les toits qu'on se bat pour l'Ordre du Phénix, surtout au Ministère et par les temps qui courent... », il précise en se redressant pour tâcher de reprendre un peu contenance. « Ensuite parce que je me plais à croire que mon frère est le plus intelligent et le plus fin de nous deux et que même moi, je savais que tu ne prendrais pas la nouvelle de la meilleure façon qu'il soit - alors j'imagine sans mal pourquoi il t'a épargné l'effet d'annonce, Hestia... » Il soupire un peu et se masse les temps - une grimace légère passe sur son visage quand il réalise à quel point il peut paraître sec et indifférent, alors qu'il n'est ni l'un ni l'autre. « Je suis désolé. Je voulais pas te l'apprendre comme ça, j'imagine que ce n'est pas la meilleure nouvelle de la journée. » Il se redresse un peu et hésite quelques secondes à s'approcher. « Quelques mois. Presque un an, maintenant. Il y tenait, et personne n'a réellement le droit de s'opposer. Pas même moi - surtout pas moi qui me bat. C'est normal de vouloir se battre contre l'injustice, même si, évidemment... » Gid grimace à nouveau avant de relever les yeux vers Hestia. « J'ai peur pour lui. Je ne te demande pas de le convaincre de se retirer - il ne le fera pas, et j'ai promis de ne plus l'y inciter. Je veux juste qu'il fasse attention - et quand je le lui demande, je sais très bien qu'il ne prend pas ma requête très au sérieux. Je ne suis que son insolent de frère agaçant, tu es bien placée pour le savoir, Hestia. » Gideon croise les bras et prend une inspiration - pour tenter, aussi de garder son calme. « Ca n'a rien à voir avec un quelconque manquement à mon rôle de grand-frère. J'ai fait ce que j'ai pu, d'accord ?. » Il secoue la tête, reste calme malgré l'attaque à peine déguisée.

Parce que oui, pour une fois, Gideon, désintéressé, ne s'inquiète que pour son frère.

De mes doigts fins, j’allais trouver mes tempes. Petits cercles délicatement dessinés, j’espérais que cette vaine tentative de massage résorberait ce mal de crâne qui venait de se manifester. Il y avait de quoi, après cette annonce - qui n’était pas censée en être une -. Gideon s’était pointé dans mon bureau comme une fleur, sans imaginer pendant une milli-seconde que j’étais encore dans l’ignorance. Chaque syllabe prononcée m’agaçait un peu plus, et j’avais envie de répliquer sèchement à ses belles paroles, soigneusement choisies. Pourtant, l’irritation était trop grande. Un soupir s’échappa de mes lèvres. Il fallait que je garde mon calme. Ce n’était probablement pas le bon moment pour me montrer rancunière et acerbe à son égard. Le Prewett avait mis son égo de côté pour venir me parler de Fabian. Il fallait que je me concentre sur le sujet principal de la conversation, au lieu de divaguer inutilement et de lui faire des reproches. Peut-être bien qu’il avait fait tout son possible. Et apparemment, cela n’avait pas été suffisant pour tenir son frère loin du danger, loin de la guerre. Au fond, c’était peut-être à moi-même que j’en voulais. Notre rupture, mon départ. Je n’étais pas totalement innocente dans cette prise de position.

Je pris ma baguette en main, afin de lancer un sortilège d’isolation. Parler de l’Ordre au ministère n’était certainement pas une bonne idée, comme venait de le rappeler si justement le rouquin. « Simple mesure de précaution » commentais-je à l’intention de Gideon, « cette pourriture de Yaxley travaille dans le bureau juste à côté, en laissant traîner ses oreilles un peu partout. » Corban Yaxley était un être particulièrement détestable. Il se pavanait au sein du département comme un paon, tout en écoutant aux portes tel un rat, à l’affût de la moindre information qui pouvait lui servir. Je ne mâchais pas mes mots, certainement pas d’humeur à faire dans les civilités et à contrôler mon langage. Et je préférais insulter Yaxley, plutôt que de passer ma colère sur Gid. « Tu as… » raison. Je me stoppais net. Non, je n’arriverais jamais à le dire à voix haute, jamais je ne lui donnerais une telle satisfaction. « Effectivement, il a peut-être estimé qu’il valait mieux ne pas m’en parler. Sauf que j’aurais préféré qu’il m’en parle lui-même… » Ma rencontre avec Fabian avait eu lieu dans un café moldu très discret, où il aurait très bien pu m’en parler ; il ne l’avait pas fait néanmoins, et je devais à présent assimiler cette nouvelle du mieux que je pouvais, en faisant en sorte de ne pas (trop) m’en prendre à Gideon.

« Presque un an, hein…? » répétais-je, le regard dans le vague. Cela faisait presque un an que j’étais mariée avec Sebastian. Damn it. Cette idée, ou bien le simple fait que Fabian risquait sa vie depuis si longtemps, provoqua un haut-le-cœur. Nauséeuse, je me levais de ma place brusquement, en tournant le dos à Gideon. Je ne voulais pas qu’il assiste à ma détresse. Cependant, il était bien là, au premier rang. Je passais une main tremblante dans mes cheveux, en essayant de reprendre contenance. Rien que pour quelques minutes, juste le temps de congédier Gideon, ce corbeau de mauvaise augure. Blanche comme un linge, je fis de nouveau face au rouquin, tout installé dans le fauteuil d’en face, l’air décontenancé. Je pris appui sur le bureau, en fermant les yeux pendant un instant. « Je suis désolée Gideon. Tu as beau être agaçant et insolent, tu tiens à Fabian. Et ce serait être de mauvaise foi que de t’accuser de n’avoir rien fait, parce que tu as sûrement tout fait pour éviter qu’il ne rejoigne les rangs de l’Ordre. » Lui avait essayé au moins. « Je vais lui en parler. Et j’aimerais te rassurer, te dire que je réussirais à lui faire entendre raison. Seulement, je ne suis pas sûre que ce soit vraiment ma place désormais. Même en tant qu’amie. Et je te le répète, lors de notre rencontre, Fabian n’a rien voulu savoir lorsque j’ai abordé le sujet. » Bien loin de l'énervement à présent, je cherchais à trouver un plan d'attaque assez efficace pour contenir les ardeurs révolutionnaires de mon ex-fiancé. « Tu ne t'adresses peut-être pas à la bonne personne » finis-je par ajouter, en haussant les épaules.