[flash-back] Teenagers

Dans les gradins de sa maison, Andromeda ne pouvait pas s'empêcher de regarder discrètement le gardien de l'équipe de Poufsouffle. Discrètement, c'était peut être exagérer grandement ses capacités d'ailleurs. Elle ne quittait pas les buts de l'équipe adverse des yeux en réalité, et ce en dépit du souaffle qui frôlait dangereusement ceux de sa propre équipe. Bellatrix à côté d'elle était beaucoup plus concentrée sur le jeu. Suffisamment concentrée en tout cas, pour ne pas remarquer le regard vagabondant de sa petite sœur en direction d'un né-moldu du nom de Ted Tonks. Un né-moldu à la chevelure dorée et au sourire resplendissant pour ne rien arranger. Andromeda partageait quelques cours avec ce garçon, respectivement potion, de sortilège et de divination. Andromeda s'était bien évidemment gardée de faire part de son petit coup de coeur à ses sœurs, il n'y avait de toute façon pas grand chose à raconter là dessus. Il s'était assis à côté d'elle au début de l'année lorsque personne d'autre ne s'y était risqué jusque là et rien d'autre. Bellatrix suffisait bien souvent à jouer les épouvantails. Les sœurs Black étaient des gamines à part, mais Ted Tonks lui s'en fichait un peu, ce qui n'avait pas manqué de perturber Andromeda, qui avait développé au cours des semaines, et des excitantes parties de Quidditch, un petit faible pour l'ennemi. Petit faible qui s'était transformé en un petit sourire réciproque au fil du temps.

Après la fin du match, Andromeda s'était donc rendue assez impatiente à son cours de divination. Pas qu'elle soit extrêmement douée dans l'art de lire dans les feuilles de thé, mais c'était un cours suffisamment spirituel pour discuter de tout et de rien, le tout en s'autorisant quelques sous entendus discrets auxquels personne à part eux ne feraient vraiment attention. Malgré son héritage familial, la brune était une adolescente comme les autres, et les adolescentes normales craquaient toutes pour le capitaine de l'équipe de Poufsouffle. Elle avait beau savoir que c'était une très mauvaise idée, la gentillesse teintée de maladresse du poufsouffle avait bien vite eu raison de son petit cœur de glace. Malgré la honte qu'elle éprouvait à cette idée, Andromeda ne pouvait pas s'empêcher de penser à ce qui pourrait changer après le départ de Bellatrix. Fébrile, elle déballa ses affaires et s'installa tranquillement à une table seule, en espérant que son camarade apprécie toujours autant de travailler avec elle...

- Bien joué les gars ! Allez, tous à la douche, faut que je sois paré à lire l’avenir dans les feuilles de thé dans vingt minutes, alors magnez-vous !

L’entraînement contre Serpentard s’était bien mieux passé que prévu, rendant le match relativement serré et équitable. On revenait de très loin, habitués aux dernières places des classements. J’étais d’ailleurs très fier d’avoir réussi à remotiver les troupes… et surtout de réussir brillamment dans quelque chose, même s’il ne s’agissait que de Quidditch : avec la baguette têtue que je me tape, j’étais tout juste bon dans les autres matières… sauf en divination. Pour je ne sais quelle raison obscure, la vieille folle qui s’occupait de donner ce cours me trouvait très doué, presque clairvoyant. Je passais pourtant mon temps à raconter n’importe quoi. À croire qu’elle m’aimait bien. C’est pour ça que j’ai gardé l’option malgré que je m’y sois toujours profondément ennuyé : les notes faciles…

Lorsque j’ai passé la porte de la salle de divination, j’ai jeté un coup d’œil furtif aux tables, y cherchant la seconde raison – bien inavouée - de ma présence : Andromeda Black. Je partageais trois cours avec la Serpentard, une demoiselle que j’avais toujours beaucoup appréciée tandis que les autres semblaient la fuir. Je l’ai donc rejointe une fois repérée, non sans l’avoir observée furtivement fouiller dans son sac, un grand sourire aux lèvres.

- Hey, Andie ! Prête à découvrir combien d’années il me reste à vivre en déchiffrant les lignes de ma main ?

J’esquisse un sourire narquois alors que je me moque ouvertement du contenu de ce cours dans lequel je suis étrangement doué.

- Comment vas-tu ? Je t’ai vue dans les gradins, à l’entraînement… vous avez bien joué.

Et puis il apparaît, et Andromeda tente de rester droite, de ne pas avoir l'air trop perturbée par le capitaine de l'équipe de Quidditch, qui éclaire déjà la salle de son positivisme et de son sourire, retournant évidemment quelques regards sur son passage, rien de très étonnant. Elle sait que son attirance pour ce garçon est quelque chose qu'elle doit impérativement garder pour elle, en particulier devant ses camarades de Serpentard qui pourraient tout raconter à ses sœurs, mais d'une certaine manière, elle se sent en sécurité, derrière cette petite tasse de thé à attendre qu'il vienne s'asseoir auprès d'elle. Lorsqu'il s'adresse enfin à elle, elle hoche la tête tout d'abord, lui faisant un peu de place sur la table, puis profitant d'un moment d'agitation de la classe, elle lui adresse un sourire discret et complice. « Sûrement pas beaucoup, si on se fie aux feuilles de thé de la semaine dernière... » commente t-elle amusée, en gardant toujours cet air un peu froid que n'importe qui d'autre que Ted Tonks interpréterait complètement autrement. « J'ai vu que tu n'es pas tombé de ton balais, pour une fois. », le taquine t-elle gentiment, en jouant avec l'une des boules de cristal.

- Aoutch, touché en plein cœur, je plaisante.

Il est vrai qu’à en croire les prédictions de la semaine précédente, il ne me reste qu’une petite trentaine d’années à vivre. Et je me vois mal passer l’arme à gauche à même pas cinquante ans, voyez-vous. Quoique… mourir avant de devenir un vieux croulant, pourquoi pas. Mais soit ! Ces feuilles de thé n’ont rien d’autre à dire qu’un ramassis de débilités, je me contente donc d’asséner un sourire à Andie pour lui signifier la plaisanterie.

- Je ne suis tombé qu’une fois, je te signale…

Faisant mine de réfléchir, je me rappelle de ce match contre Serpentard au mois de septembre où, victime d’un cognard perdu, le pauvre gardien que je suis s’est retrouvé droit sur le sol. Puis, de cette fois où j’ai perdu l’équilibre, en quatrième année. Et de l’autre fois où, pour m’amuser, j’ai tenté de jouer comme batteur…

- Bon, je me rattrape, une seule fois contre Serpentard, d’accord. Mais je m’améliore !

Mon rire léger résonne encore lorsque que Mrs Lovegood entre dans la pièce avec ses grands gestes et ses grands airs. Au programme du jour : les lignes de la main, comme prévu. Chouette, de quoi baratiner n’importe quoi et encore gagner des points ! Autant ce cours est débile, autant il est agréable de se sentir bon sans rien faire…

- Je suppose qu’il est temps de vérifier la prophétie de la semaine dernière ? , je plaisante à nouveau, lançant un regard malicieux à Andromeda.

Andromeda réprime un rire, il ne faudrait pas qu'elle paraisse trop amusée par ce Tonks en public. Les élèves de sa classe la regardent déjà avec une curiosité teintée de dégoût. La seule raison pour laquelle, l'un d'eux ne vient pas tout cafter avec Bellatrix, c'est probablement parce qu'ils ont peur du courroux de l'aînée des Black. Et d'après Andromeda, ils ont raison. De telles insinuations, se retourneraient probablement contre eux. Le tout lui laisse donc un semblant de liberté appréciable dont elle compte bien profiter en attendant que les choses se gâtent. Bien que toujours torturée par l'idée de déclencher les foudres de sa famille, et en particulier celle de Bellatrix, Andromeda ne peut cependant pas s'empêcher de laisser son esprit divaguer. Alors ses yeux se posent sur le né-moldu qui s'est assis à côté d'elle, et la pureté de son sang ne semble plus tellement avoir d'importance alors que son cœur s'emballe déjà légèrement lorsqu'elle prend sa main dans la sienne pour lire les ligne de sa main, ou quoi qu'elle soit en train de faire avec sa main dans la sienne... « Ce qui ne serait sans doute pas arrivé, si tu ne faisais pas des clins d’œils aux filles dans les gradins, pendant les matchs. » Jalouse Andromeda ? Absolument pas. « Tu vas... adopter un chat ? J'en sais rien, même le bouquin se contredit. A ton tour. » Elle ne peut pas s'empêcher de le fixer, sa main toujours dans la sienne. Son cousin jette un regard assassin à Tonks à qui il siffle une insulte des plus communes ces derniers temps. « Mudblood. »

- Je ne fais pas de… je commence, tendant la main vers Andromeda pour qu’elle exécute l’exercice demandé par Lovegood, ou du moins qu’elle fasse semblant. Mais, hé, dois-je en conclure que tu m’observes ?

Quant à moi, je me contredis. Oui, j’avoue, il m’arrive de faire un clin d’œil ou l’autre à une demoiselle dans les gradins. Je chasse cette question d’un geste de la main, la même qu’Andie est occupée à observer, lui rendant la tâche plus compliquée que prévu. J’apprécie le contact, cependant, même s’il ne s’agit que d’une vulgaire mise en pratique d’une technique ridicule de divination.

- Un chat ? Pourquoi pas, j’ai une préférence inavouée pour les crapauds, cela dit…, je commente, ironique.

À mon tour de prendre sa main dans la mienne et je me fais involontairement plus tactile que nécessaire, repassant d’un doigt les différentes lignes de sa main pour vérifier leur signification dans ce foutu livre.

- Si j’en crois ce grimoire à deux balles, tu vas…
- Mudblood, m’interrompt un sifflement dans mon dos.

Je me retourne, lâchant la main d’Andromeda. Je sais que ce garçon est son cousin, je sais aussi que je ne devrais pas me lier avec elle, pas pour son propre bien de sang-pur. Me faire insulter ne me dérange pas plus que ça, je commence à y être habitué par les temps qui courent, et je sens que pour cette fois, il faut que je m’écrase.

- Tu vas avoir une vie heureuse, je grogne sans grande conviction en m’affalant dans mon siège. Je crois. Désolé.

Si je me sens obligé de m’excuser, c’est parce que je sais que pour les sang-pur, c’est une question importante. On ne se mêle pas aux gens impurs. Et je me doute qu’elle s’en fiche, sinon elle ne me parlerait pas et me traiterait comme tous les autres, mais elle est différente. Et je ne veux pas lui causer de problèmes.

- Je peux te laisser tranquille... si tu veux ? Pas que j’en aie envie, loin de là. Mais je veux pas que… t’aies de problèmes ou… ou je sais pas.

Andromeda se laisse avoir par un instant par l'atmosphère douce du moment qu'ils partagent tous les deux. Jusqu'à ce tout ça soit interrompu par une insulte provenant d'un Slytherin qui se trouve n'être rien d'autre qu'un de ses nombreux cousins. Andromeda se sent soudainement mal à l'aise, alors que le Ted qu'elle connaît se décompose devant l'insulte, lâchant sa main, et abandonnant là les fausses prédictions qui rythmaient jusque là le cours de divination. Andromeda reste un instant confuse et panique intérieurement, réalisant que le garçon confiant qui passe négligemment sa main dans ses cheveux comme Danny Zuko, et offre des sourires à qui en veut, est véritablement blessé par le commentaire de Rosier. Lorsqu'elle est de nouveau en mesure de réagir, Ted s'excuse presque d'avoir eu l'audace de venir s'asseoir à côté d'elle. Andromeda se sent triste, et inconsciemment elle pose sa main sur le bras de Tonks comme pour le réconforter, avant de reporter son attention sur le fond de bol de thé censé lui prédire l'avenir. Elle se sent lâche, inutile, et le sentiment lui paraît bien désagréable. « Je n'ai pas envie que tu me laisses tranquille. », chuchote t-elle cependant à son intention. Elle n'est pas vraiment capable de mieux pour l'instant, paralysée par la peur des représailles. « Et tu n'es pas qu'un sang-de bourbe Ted Tonks. » ajoute elle plus bas encore, de peur d'être entendue par ses camarades. A la fin de l'heure, elle lui adresse un regard désolée, prenant son temps pour ranger ses affaires.

L’insulte ne m’atteint pas. Pas vraiment. Ce n’est pas tant d’être appelé « sang-de-bourbe » qui me décompose. Car né-moldu, je le suis. C’est moi, mon identité, et j’en suis fier. Je ne suis peut-être pas un sorcier brillant venu d’une grande lignée, mais je sais au moins que je ne dois pas me sentir insulté par les mots piquants. Ce qui fait mal, c’est plutôt de n’être uniquement insulté car je suis en présence d’une fille Black. De me rendre compte que je n’ai pas le droit de m’entendre avec qui je veux. Ça, c’est plombant. Et je me sens obligé de m’excuser auprès d’Andromeda, comme si j’avais choisi d’avoir cette affinité avec elle. Peut-être aurais-je dû la laisser seule sur son pupitre, à ruminer. Peut-être.

Mais elle ne semble pas affectée négativement par ma présence. Au contraire, elle m’invite à rester près d’elle, à ne pas la laisser tranquille. Et j’apprécie le geste.

- Merci, je murmure avant de revenir à mes occupations.

L’heure passe si lentement que j’ai l’impression qu’elle ne se terminera jamais. Je n’interagis pas outre mesure avec Andie pour éviter qu’on s’en prenne à elle aussi. Lorsque vient la fin et qu’elle m’adresse ce regard désolé, je lui réponds par une grimace mais prends autant de temps qu’elle à ranger mes affaires. Aussi, nous nous retrouvons seuls dans la salle de classe une fois que le reste des élèves s’en est allé non sans nous jeter quelques regards indiscrets et souvent partagés entre dégoût et mépris.

- Ils n’ont pas l’air d’apprécier de te voir traîner avec un sang-de-bourbe, Black, je déclare, un peu penaud. Faut me le dire si ça te cause des problèmes, je me ferai plus... discret ?

Point d’interrogation. Discret sur quoi, exactement, alors que je ne faisais déjà rien de plus méchant que de lui adresser la parole ? Sinon peut-être avoir quelques atomes crochus… Aucun mal là-dedans, à mon sens.

- C’est peut-être malvenu de dire que j’apprécie ta présence, au vu de la situation. Mais c’est le cas.

Je n’ose pas la regarder, n’ayant moi-même aucune idée de pourquoi je lui raconte ça. Peut-être parce qu’on est seuls et que je viens de comprendre que le monde entier voudrait nous voir nous battre plutôt que nous rapprocher. Autant vous dire que je n’en ai pas la moindre envie, que du contraire.
plus… discret ?

Andromeda ne sait pas trop quoi dire, ni quoi faire, elle à qui on a finalement trop souvent dicté la conduite, et qui n'a jamais bronché. Elle n'avait pas vraiment prévu qu'un charmant né-moldu de poufsouffle vienne s'ajouter à l'équation pour être honnête, et la voilà confuse, sans trop savoir quelle limite elle peut s'autoriser à dépasser avec Ted Tonks. En réalité, elle sait très bien qu'elle est déjà allée trop loin, en s'entichant de l'archétype de l'ennemi pour la famille Black. Pourtant, lorsqu'elle le regarde, elle n'arrive pas à vraiment à expliquer le sens de toute cette idée selon laquelle les né-moldu seraient inférieurs aux sang-purs, et devraient être traités différemment. Tout ça n'a pas tellement de sens lorsqu'elle y réfléchit, mais s'opposer à sa famille est une toute autre histoire. Les parents d'Andromeda ne sont pas de ceux que l'on contrarie, qu'on soit d'accord ou non avec ce qu'ils pensent être juste. Alors déchirée, elle se contente d'attendre que les autres se précipitent au dehors, incapable cependant de garder le contrôle de son cœur qui s'agite toujours désagréablement en présence de ce garçon. « Ca ne me pose pas de problème. Évite simplement de m'adresser la parole quand je suis avec Bellatrix et Narcissa. » répond t-elle avant de prendre conscience qu'il pourrait tout à fait le prendre mal, même si c'est surtout pour lui qu'elle dit ça. « Bellatrix n'hésiterai pas à te provoquer en duel. Et tu sais, ta baguette... Je veux dire, ce serait une mauvaise idée, c'est tout. Tu as déjà toutes les raisons du monde d'aller à l'infirmerie. » petit sourire tendre alors qu'elle repense à la chute spectaculaire de la semaine dernière. « J'apprécie ta présence, moi aussi. », finit t-elle par ajouter.

Je hoche la tête, les yeux baissés vers le sol lorsqu’elle me recommande de ne pas lui parler en présence de ses sœurs. Je peux la comprendre tout comme je trouve ça injuste et malvenu. Je risquerais de lui causer des problèmes familiaux par le simple fait d’avoir des parents moldus. Comme s’il s’agissait d’une espèce de malédiction ou de maladie contagieuse. « Sang-de-bourbe », sang impur, comme si ça pouvait se transmettre alors même que je n’ai aucune idée d’où se trouve le problème. Avais-je demandé à naître sorcier dans une famille moldue ? Avais-je demandé à venir au monde, tout simplement ? Pas vraiment.

Et je comprends sa demande. Elle ne me satisfait qu’à moitié mais je la comprends, et mon visage s’illumine à nouveau, car tout ce qui compte à mes yeux c’est qu’elle ne me fuie pas. Je n’ai aucune raison de continuer à m’abattre si elle apprécie ma présence autant que j’apprécie la sienne, puisque je n’ai rien à me reprocher. Je n’ai rien fait de mal.

- Ma baguette va très bien, je te remercie, je réponds en souriant. Mais tu sais, l’infirmerie est un peu devenue ma seconde maison. On a droit à une seconde ration de dessert, quand on s’y trouve, alors tu penses bien…

Plaisanterie. Je balance mon sac sur une épaule avant de faire mine de me diriger vers la sortie, non sans passer une main dans mes cheveux pour la route.

- Bon… un quart de seconde de silence gêné durant lequel je regarde partout sauf vers l’adolescente. J’ai métamorphose dans dix minutes et McGonagall va m’allumer si j’arrive encore en retard, du coup… On se voit plus tard ?

Ted semble aller et mieux et plaisante de nouveau. Quelque part, Adromeda se sent soulagée. Ce n'est pas très agréable de le voir se décomposer après une insulte proférée par quelqu'un comme elle, son cousin en l'occurrence, car elle ne peut pas s'empêcher de se sentir coupable, elle a qui on a trop bien appris à se tenir à l'écart des sang de bourbe, comme Ted Tonks. Le tout la pousse évidemment à remettre beaucoup de choses en question, ce qui l'effraie et la travaille ces derniers temps. Mais elle n'y peut rien. L'adolescente qu'elle est parvient bien mal à gérer les élans de son cœur qui semble réagir un peu trop facilement à la présence du poufsouffle. Elle se surprend souvent à se demander pourquoi les choses se doivent d'être si compliquées, et jusque là, aucune réponse ne semble l'éclairer sur ce point Un gouffre abyssal se creuse entre ce que lui dicte son éducation, et ses sentiments bourgeonnants pour lé né-moldu, et si le tout la terrorise, elle ne parvient pas à imposer la distance qu'il lui faudrait maintenir entre eux. Andromeda sait comment sont les choses au dehors, mais l'atmosphère douce de l'école et l'attrait des chocolats chaud pris à pré-au-lard sous la neige, l'invitent dangereusement à ne penser qu'à elle, et à Ted Tonks et son invitation par extension... Incapable de vraiment comprendre ce qu'il entend par là, Andromeda ne veut pas prendre le risque d'insinuer quoi que ce soit et demande alors : « Plus tard ? »

« Plus tard ? », me demande-t-elle, et je fronce discrètement les sourcils au départ. Ne sait-elle pas que nous avons le cours de sortilèges en commun demain matin ? Pourtant, notre horaire n’a pas changé d’un poil depuis plusieurs semaines à présent et c’est un peu devenu ma routine de m’asseoir à côté d’elle au cours de Flitwick, de foirer la moitié de mes exercices à cause de ma têtue de baguette, puis de la faire rire. Parfois, je soupçonne ma baguette de le faire exprès, comme si elle avait décidé de rendre ridicules toutes mes tentatives de lancer un sort en présence d’Andromeda, parce que je la vois avec le sourire.

Et que son sourire est craquant, soyons francs. Un peu inconsciemment, je donnerais le monde entier pour qu’elle sourie plus souvent.

Alors, je comprends l’insinuation. Ou plutôt, l’insinuation inconsciente que je venais de lui faire et je décide de sauter sur l’occasion. J’ai très envie de la voir en dehors d’une salle de classe, là où personne ne pourrait nous voir et la juger pour la mauvaise fréquentation que je représente sans aucune doute.

- On a entraînement de Quidditch demain à 20h, avec Poufsouffle. Tu pourrais venir après ? Le terrain n’est pas réservé après nous, et…

Et tais-toi, Ted Tonks. Tais-toi et attends sa réaction, ne t’enfonce pas et prépare-toi à partir en courant en regrettant cette question pour les trois semaines à venir.

Andromeda est partagée. Elle doit bien admettre qu'une invitation est bien ce qu'elle espérait au plus profond d'elle, mais elle ne peut pas non plus se convaincre aussi facilement que c'est une bonne idée. Aussi, elle se demande bien quel genre de rendez-vous galant pourrait se dérouler sur un terrain de Quidditch à 20h. Elle plisse alors les yeux, en se demandant si le capitaine de l'équipe de Quidditch voit les choses de la même manière qu'elle. Et soudainement c'est la panique dans l'esprit d'Andromeda qui ne sait pas vraiment comment répondre à cette invitation. Les choses seraient beaucoup plus simples si elle pouvait quémander des conseils à Narcissa qui a toujours été l'experte des sœurs Black dans ce genre de domaine. Mais Andromeda doit composer avec le fait qu'elle ne peut absolument pas s'épancher sur ses sentiments avec qui que ce soit, et surtout pas ses sœurs. Leur relation si elle devait exister, devrait rester un secret. « Il nous faut une autorisation pour quitter les salles communes après vingt heures, et comme je ne fais pas partie de l'équipe de Quidditch, c'est impossible. Mais on se verra en sortilèges. » finit t-elle par lâcher, frustrée par cette conversation. Peut être que c'est pour le mieux, après tout, le coup du Quidditch est sûrement un grand classique de Tonks. Elle ne veut pas être un nom de plus sur une liste déjà bien remplie. Peut être qu'elle aurait pris le risque pour un chocolat. Pour l'instant, elle serre son grimoire contre sa poitrine et lui adresse un vague sourire toujours teinté de la frustration suscitée par cette heure agitée. « Au revoir, Ted. ». Et elle le laisse là, seul avec la professeure de divination qui le regarde d'un air suspect.

- Oh.

Me prendre un râteau me fait plus de mal que prévu. Je ne sais pas si le fait que ce soit le premier de toute ma vie ait une quelconque incidence sur comment je me sens ou si c’est uniquement le fait qu’elle ait refusé et pas une autre. Mon cœur se serre un peu, déçu, mais je tente de garder ma consistance. On se verra en sortilèges, comme elle dit, ce sera suffisant. Sommes-nous supposés nous voir ailleurs, d’ailleurs ?

J’ai conscience de la demande incongrue que ça représente, de rencontrer quelqu’un sur un terrain de Quidditch désert en pleine nuit. Je ne voyais pas le mal en posant la question, mais je comprends que ça puisse être bizarre, et… et je ne sais pas. Est-ce que j’ai simplement mal interprété le signal ? Peut-être.

- Je comprends, je termine, un peu penaud. À demain, Andie.

Je me sens vraiment attristé par ce refus, aussi étrange cela puisse paraître. Je n’ai pas l’habitude qu’on me « résiste », je me sens à nouveau rejeté, perdu, confus. Le courant passait pourtant bien.

- Que faites-vous encore là, Mr Tonks ?, me demande alors la professeure en levant les yeux de son grimoire.

Secouant la tête, je me dirige vers la sortie d’une démarche machinale.

- Désolé, Mrs Lovegood. Au revoir.

Et je sors, l’esprit embrumé, à ressasser le moment encore et encore, à le faire tourner dans ma tête. Ne venais-je pas de faire la plus grosse erreur de toute ma vie ? Les choses allaient-elles devenir étranges entre Andromeda et moi, à présent ? N’avait-elle pas refusé à contre-cœur ? Ou au contraire : n’étais-je qu’un gros boulet, incapable de comprendre que je n’avais rien à faire avec quelqu’un comme elle ?

RP TERMINE.